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Appliquons-nous à éviter le parler bébé ou le parler populaire.
On entend trop souvent POUR PAS QUE ou POUR NE PAS QUE ou POUR PLUS QUE. C'est une faute.
On dit POUR QUE, locution conjonctive, qui introduit une proposition dont le verbe est à la forme négative.
Exemple
Si l'on veut parler correctement, on ne dit pas :
Je te conseille de prendre un tablier pour pas que tu te salisses.
ni :
Je te conseille de prendre un tablier pour ne pas que tu te salisses.
mais on dit :
Je te conseille de prendre un tablier pour que tu ne te salisses pas.
Lorsque le sujet de la proposition principale est le même que celui de la proposition subordonnée, on emploie un infinitif.
On ne dit pas :
Je prendrai un tablier pour pas que je me salisse.
mais on dit :
Je prendrai un tablier pour ne pas me salir.
Corrigez les phrases
Chaque soir, Maman me mettait le pot à côté de mon lit pour pas que je mouille mes draps. Sitôt que j'avais envie, je sautais à bas du lit. Le pot était là, tout près, pour pas que j'aie à traverser l'appartement. C'était vite fait. Parfois je m'oubliais. Les draps étaient trempés. Alors je disais à Maman que j'avais été malade pour pas qu'elle me gronde ; ou bien j'allais chercher des draps propres et je cachais les draps souillés sous l'armoire pour pas qu'elle les voie.
Papa disait : "Ce petit a un problème de vessie. On va l'emmener chez le docteur pour plus qu'il fasse pipi n'importe où."
Il m'arrivait aussi d'inonder ma chaise à l'école. Un jour j'ai fait caca, ma grosse commission si vous voulez. J'ai rien dit pour pas que la maîtresse le voie. Mais Julien, mon voisin, a senti. Je l'ai menacé pour pas qu'il me dénonce. J'en avais plein les cuisses et je me suis mis à pleurer. La maîtresse a compris et m'a nettoyé pour pas que je reste comme ça, tout plein de caca. Elle est gentille ma maîtresse. Je crois que je recommencerai pas pour pas qu'elle ait de nouveau à faire ça.
Pour pas que je m'essuie quand je vais au cabinet (j'ai horreur de ça) j'appelle Maman. Aujourd'hui elle m'a dit : "C'est ton anniversaire, tu as huit ans. Je t'essuierai plus les fesses à l'avenir pour plus que tu te comportes comme un bébé."
C'est dur de grandir.
Correction
Chaque soir, Maman me mettait le pot à côté de mon lit pour que je ne mouille pas mes draps. Sitôt que j'avais envie, je sautais à bas du lit. Le pot était là, tout près, pour que je n'aie à traverser l'appartement. C'était vite fait. Parfois je m'oubliais. Les draps étaient trempés. Alors je disais à Maman que j'avais été malade pour qu'elle ne me gronde pas ; ou bien j'allais chercher des draps propres et je cachais les draps souillés sous l'armoire pour qu'elle ne les voie pas.
Papa disait : "Ce petit a un problème de vessie. On va l'emmener chez le docteur pour qu'il ne fasse plus pipi n'importe où."
Il m'arrivait aussi d'inonder ma chaise à l'école. Un jour j'ai fait caca, ma grosse commission si vous voulez. Je n'ai rien dit pour que la maîtresse ne le voie pas. Mais Julien, mon voisin, a senti. Je l'ai menacé pour qu'il ne me dénonce pas. J'en avais plein les cuisses et je me suis mis à pleurer. La maîtresse a compris et m'a nettoyé pour que je ne reste pas comme ça, tout plein de caca. Elle est gentille ma maîtresse. Je crois que je ne recommencerai pas pour qu'elle n'ait pas de nouveau à faire ça.
Pour ne pas m'essuyer quand je vais au cabinet (j'ai horreur de ça) j'appelle Maman. Aujourd'hui elle m'a dit : "C'est ton anniversaire, tu as huit ans. Je ne t'essuierai plus les fesses à l'avenir pour que tu ne te comportes plus comme un bébé.
C'est dur de grandir.
Des équivalences :
Maman me mettait le pot à côté de mon lit pour que je ne mouille pas mes draps.
Maman me mettait le pot à côté de mon lit afin que je ne mouille pas mes draps.
Maman me mettait le pot à côté de mon lit de peur que je (ne*) mouille mes draps.
Maman me mettait le pot à côté de mon lit de crainte que je (ne*) mouille mes draps.
(ne* est explétif, on peut ne pas le mettre)
Voir les articles :
Remarque : On emploie le subjonctif après ces locutions conjonctives de but.
NE explétif - Quand peut-on l'employer ?
***
Le petit texte que j'ai osé commettre ci-dessus me fait irrésistiblement penser à un chapitre du roman Poil de Carotte de Jules Renart.
Le voici :
LE POT
Comme il lui est arrivé déjà plus d’un malheur au lit, Poil de Carotte a bien soin de prendre ses précautions chaque soir. En été, c’est facile. À 9 heures, quand madame Lepic l’envoie se coucher, Poil de Carotte fait volontiers un tour dehors ; et il passe une nuit tranquille.
L’hiver, la promenade devient une corvée. Il a beau prendre, dès que la nuit tombe et qu’il ferme les poules, une première précaution, il ne peut espérer qu’elle suffira jusqu’au lendemain matin. On dîne, on veille, 9 heures sonnent, il y a longtemps que c’est la nuit, et la nuit va durer encore une éternité. Il faut que Poil de Carotte prenne une deuxième précaution.
Et ce soir, comme tous les soirs, il s’interroge.
— Ai-je envie ? se dit-il ; n’ai-je pas envie ?
D’ordinaire il se répond « oui », soit que, sincèrement, il ne puisse reculer, soit que la lune l’encourage par son éclat. Quelquefois M. Lepic et grand frère Félix lui donnent l’exemple. D’ailleurs la nécessité ne l’oblige pas toujours à s’éloigner de la maison, jusqu’au fossé de la rue, presque en pleine campagne. Le plus souvent il s’arrête au bas de l’escalier ; c’est selon.
Mais, ce soir, la pluie crible les carreaux, le vent a éteint les étoiles et les noyers ragent dans les prés.
— Ça se trouve bien, conclut Poil de Carotte, après avoir délibéré sans hâte, je n’ai pas envie.
Il dit bonsoir à tout le monde, allume une bougie, et gagne au fond du corridor, à droite, sa chambre nue et solitaire. Il se déshabille, se couche et attend la visite de madame Lepic. Elle le borde serré, d’un unique renfoncement, et souffle la bougie. Elle lui laisse la bougie et ne lui laisse point d’allumettes. Et elle l’enferme à clef parce qu’il est peureux. Poil de Carotte goûte d’abord le plaisir d’être seul. Il se plaît à songer dans les ténèbres. Il repasse sa journée, se félicite de l’avoir fréquemment échappé belle, et compte, pour demain, sur une chance égale. Il se flatte que, deux jours de suite, madame Lepic ne fera pas attention à lui, et il essaie de s’endormir avec ce rêve.
À peine a-t-il fermé les yeux qu’il éprouve un malaise connu.
— C’était inévitable, se dit Poil de Carotte.
Un autre se lèverait. Mais Poil de Carotte sait qu’il n’y a pas de pot sous le lit. Quoique madame Lepic puisse jurer le contraire, elle oublie toujours d’en mettre un. D’ailleurs, à quoi bon ce pot, puisque Poil de Carotte prend ses précautions ?
Et Poil de Carotte raisonne, au lieu de se lever.
— Tôt ou tard, il faudra que je cède, se dit-il. Or, plus je résiste, plus j’accumule. Mais si je fais pipi tout de suite, je ferai peu, et mes draps auront le temps de sécher à la chaleur de mon corps. Je suis sûr, par expérience, que maman n’y verra goutte.
Poil de Carotte se soulage, referme ses yeux en toute sécurité et commence un bon somme.
Brusquement il s’éveille et écoute son ventre.
— Oh ! oh ! dit-il, ça se gâte !
Tout à l’heure il se croyait quitte. C’était trop de veine. Il a péché par paresse hier soir. Sa vraie punition approche.
Il s’assied sur son lit et tâche de réfléchir. La porte est fermée à clef. La fenêtre a des barreaux. Impossible de sortir.
Pourtant il se lève et va tâter la porte et les barreaux de la fenêtre. Il rampe par terre et ses mains rament sous le lit à la recherche d’un pot qu’il sait absent.
Il se couche et se lève encore. Il aime mieux remuer, marcher, trépigner que dormir et ses deux poings refoulent son ventre qui se dilate.
— Maman ! maman ! dit-il d’une voix molle, avec la crainte d’être entendu, car si madame Lepic surgissait, Poil de Carotte, guéri net, aurait l’air de se moquer d’elle. Il ne veut que pouvoir dire demain, sans mentir, qu’il appelait.
Et comment crierait-il ? Toutes ses forces s’usent à retarder le désastre.
Bientôt une douleur suprême met Poil de Carotte en danse. Il se cogne au mur et rebondit. Il se cogne au fer du lit. Il se cogne à la chaise, il se cogne à la cheminée, dont il lève violemment le tablier et il s’abat entre les chenets, tordu, vaincu, heureux d’un bonheur absolu.
Le noir de la chambre s’épaissit.
Poil de Carotte ne s’est endormi qu’au petit jour, et il fait la grasse matinée, quand madame Lepic pousse la porte et grimace, comme si elle reniflait de travers.
— Quelle drôle d’odeur ! dit-elle.
— Bonjour, maman, dit Poil de Carotte.
Madame Lepic arrache les draps, flaire les coins de la chambre et n’est pas longue à trouver.
— J’étais malade et il n’y avait pas de pot, se dépêche de dire Poil de Carotte, qui juge que c’est là son meilleur moyen de défense.
— Menteur ! menteur ! dit madame Lepic.
Elle se sauve, rentre avec un pot qu’elle cache et qu’elle glisse prestement sous le lit, flanque Poil de Carotte debout, ameute la famille et s’écrie :
— Qu’est-ce que j’ai donc fait au ciel pour avoir un enfant pareil ?
Et tantôt elle apporte des torchons, un seau d’eau, elle inonde la cheminée comme si elle éteignait le feu, elle secoue la literie et elle demande de l’air ! de l’air ! affairée et plaintive.
Et tantôt elle gesticule au nez de Poil de Carotte :
— Misérable ! tu perds donc le sens ! Te voilà donc dénaturé ! Tu vis donc comme les bêtes ! On donnerait un pot à une bête, qu’elle saurait s’en servir. Et toi, tu imagines de te vautrer dans les cheminées. Dieu m’est témoin que tu me rends imbécile, et que je mourrai folle, folle, folle !
Poil de Carotte, en chemise et pieds nus, regarde le pot. Cette nuit il n’y avait pas de pot, et maintenant il y a un pot, là, au pied du lit. Ce pot vide et blanc l’aveugle, et s’il s’obstinait encore à ne rien voir, il aurait du toupet.
Et, comme sa famille désolée, les voisins goguenards qui défilent, le facteur qui vient d’arriver, le tarabustent et le pressent de questions :
—Parole d’honneur ! répond enfin Poil de Carotte, les yeux sur le pot, moi je ne sais plus. Arrangez-vous.
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