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Que de chemin parcouru depuis mon arrivée à Utopinambourg ! Que d'aventures périlleuses ! Que de gens rencontrés au fil de mes pérégrinations !
Pouvais-je aujourd'hui considérer que j'étais établie, que j'avais enfin trouvé une certaine sérénité et que je devais m'en tenir là ?
Lio et moi devenions de jour en jour plus estimées. Notre travail nous apportait les satisfactions dont nous rêvions, celles d'améliorer le cœur de nos semblables. Que demander de plus ?
J'aurais pu me dire qu'il n'y avait pas besoin de me tourmenter. Non que je sentisse quelquefois, recrue de fatigue, poindre l'envie de m'abandonner à mon destin, mais j'allais jusqu'à croire cependant que rien n'aurait pu mieux m'apaiser que de partir à la découverte de moi-même.
Ce serait bien mal me connaître que de penser que je pouvais renoncer à la recherche de mes origines. On m'avait volé toute une partie de ma vie, et je ne pouvais atteindre la sérénité à laquelle j'aspirais de toutes mes forces. Malgré l'enthousiasme et l'espoir inhérents à ma nature, je ne pouvais concevoir de bonheur sans la poursuite de la vérité. Ne semblait-elle pas se dérober devant chacun de mes pas ?
Je m'efforçais de grappiller autour de moi quelques bribes, quelques miettes de la réalité si difficile à atteindre, mais les pièces du puzzle que je parvenais à rassembler étaient si rares, si ténues, si dispersées, que je n'étais pas à même de découvrir un arrangement logique qui eût pu m'éclairer tout à fait.
Je pensais qu'il en était ainsi pour tous les hommes avides de savoir les tenants et les aboutissants de leur arrivée sur la terre, aventure si peu compréhensible que leur vie entière ne suffirait pas.
Tant de philosophes, et des plus fameux, ont déployé toute leur énergie à trouver des moyens leur permettant une approche de la vérité.1
La réalité qui s'étalait devant moi, incommensurable et énigmatique, n'était-elle qu'un pâle reflet sur le fond de la caverne platonicienne2 qui s'offrait à ma vue ? Comment faire pour me délivrer des chaînes qui m'eussent permis de sortir enfin de cette demeure souterraine et de découvrir le monde tel qu'il était ?
Ou bien fallait-il que je connusse toutes les catégories kantiennes3 pour les mettre en pratique et décrypter l'improbable, l'inatteignable, l'inintelligible ?
Pouvais-je espérer un instant que cela fût possible ?
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1->> La Vérité, toute la Vérité, rien que la Vérité...
2-Platon, philosophe athénien, vers 427 avant J.C. - vers 346 avant J.C.
3-Emmanuel Kant, philosophe allemand, 1724 – 1804, fondateur de l'idéalisme transcendantal.
NOTES
La réalité qui s'étalait devant moi n'était-elle qu'un pâle reflet sur le fond de la caverne platonicienne
► La caverne de Platon est une célèbre allégorie qui nous met en scène, hommes enchaînés, le dos à l'entrée, à la lumière. Nous ne pouvons voir que notre ombre et l'ombre de la réalité du monde projetées au fond de la caverne.
La connaissance de la réalité nous est difficilement accessible.
La République, Livre VII
► Dans l'article Allégorie de la caverne sur Wikipédia, on peut lire la liste des œuvres qui ont repris le thème de la Caverne.
Les hommes ne cesseront jamais de rechercher la réalité au-delà des apparences.
fallait-il que je connusse toutes les catégories kantiennes
► Comment prononcer kantien ?
► Les catégories kantiennes sont les principes fondés sur l'entendement, et qui permettent à l'homme de décrypter le monde en toute objectivité.
Que puis-je savoir ?
Que dois-je faire ?
Que puis-je espérer ?
Kant tente de chercher une réponse dans la Critique de la raison pure, la Critique de la raison pratique, les Fondements de la métaphysique des mœurs et dans la Critique de la faculté de juger
Il y a besoin... ou Il est besoin...
J'aurais pu me dire qu'il n'y avait pas besoin de me tourmenter.
Il n'y a pas besoin de rechercher l'impossible.
Il n'est pas besoin de s'user à cela.
Non que je sentisse quelquefois, recrue de fatigue, poindre l'envie de m'abandonner à mon destin
► la locution conjonctive non que > Non que, non pas que, non moins que, non plus que, non point que + indicatif, subjonctif ou conditionnel, quel mode choisir ?
► Poindre
1-intransitif, sens de pointer, commencer à paraître.
À peine si le soleil poignit à l'aurore ce jour-là.
À peine s'il point aujourd'hui.
2-transitif, sens de piquer.
Une indicible douleur qui me poignait le creux de l'âme.
Georges Duhamel
Oignez vilain, il vous poindra, poignez vilain, il vous oindra.
Morale du fabliau du Moyen Âge, l'Abeille et la Guêpe
Autrement dit : Caressez un malhonneste homme, il vous fera du mal ; faites- luy du mal il vous caressera.
► Recru de fatigue, épuisé, à bout de forces.
On peut dire, entre autres : recru de souffrance, recru de tristesse, recru de cauchemars, recru de honte, recru de dégoût, recru de désespoir, recru de sommeil...
J'allais à croire cependant que rien n'aurait pu mieux m'apaiser que de partir à la découverte de moi-même.
Aller à suivi de l'infinitif, aller jusqu'à, tendre à...
Nous irons à penser que rien n'est impossible en ce monde.
décrypter l'improbable, l'inatteignable l'inintelligible
inatteignable, inaccessible, hors d'atteinte – on trouve même chez Proust : inatteingible et inattingible.
Pouvais-je espérer un instant que cela fût possible ?
Espérer
► Subjonctif après le verbe espérer dans la proposition principale, à la forme interrogative ou négative et après l'impératif négatif :
N'espère pas un instant que cela soit possible !
J'espère que tu fais pour le mieux. Présent de l'indicatif.
J'espère que tu feras pour le mieux. Futur
J'espérais que tu ferais pour le mieux. Futur du passé, concordance des temps.
J'espère que tu viendras ce soir.
ET PAS J'espère que tu viennes ce soir.
► Dans un tour négatif on peut dire au subjonctif :
Il n'espère pas que je vienne.
Il n'espérait pas que je vinsse.
Et
Il n'espérait pas que je viendrais.
► Espérer appliqué au passé dans le sens de aimer à croire, aimer à penser
Il espère avoir fait ce qu'il devait faire.
► Voir l'article Espérer
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Vers holorimes ou olorimes
Qu'est-ce à dire ?
Eh bien, la longueur de la rime a la longueur du vers, elle est à elle seule, le vers tout entier.
Un poème holorime est fait de vers homophones.
Le grand conteur Alphonse Allais 1854 -1905 nous a laissé une oeuvre pleine d'humour. Il a joué entre autres avec les holorimes.
« Par les bois du djinn où s'entasse de l'effroi,
Parle et bois du gin, ou cent tasses de lait froid. »
Mais encore :
« Alphonse Allais de l'âme erre et se f... à l'eau.
Ah ! l'fond salé de la mer ! Hé ! Ce fou ! Hallo. »
« Ah ! Vois au pont du Loing : de là vogue en mer Dante.
Hâve oiseau pondu loin de la vogue ennuyeuse. »
Suit le commentaire :
« La rime n'est pas très riche, mais j'aime mieux cela que de sombrer dans la trivialité. »
« Aidé, j'adhère au quai, lâche et rond, je m'ébats
Et déjà des roquets rongent mes bas. »
« Pas sage, le niais savait qu'Achard ne ment
Pas. ça je le niais avec acharnement. »
Et voici d'autres holorimes fameux :
Victor Hugo
« Et ma blême araignée, ogre illogique et las
Aimable, aime à régner, au gris logis qu'elle a. »
Victor Hugo encore
« Ô, fragiles Hébreux ! Allez, Rebecca, tombe !
Offre à Gilles zèbre, œufs. À l'Érèbe hécatombe ! »
Marc Monnier
« Gall, amant de la Reine, alla, tour magnanime,
Galamment de l'arène à la tour Magne, à Nîmes. »
Charles Cros
« Dans ces meubles laqués, rideaux et dais moroses,
Danse, aime, bleu laquais, ris d'oser des mots roses. »
Luc Étienne
« Danse, prélat ! L'abbé t'apprit l'air en plain-chant !
Dans ce pré-là, la bête a pris l'air en pleins champs. »
...
« À l'ivresse livré
Sous le toit de Vincent, ton hôte au cul peu rond,
Saoule-toi de vin : cent tonneaux t'occuperont »
Louise de Vilmorin
« Étonnamment monotone et lasse
Est ton âme en mon automne, hélas ! »
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Pour amateurs de scrabble, les petits mots avec Z
Mots de trois lettres
fez, gaz nez, lez, raz, rez, riz, ruz, zec, zee, zef, zek, zen, zig, zip, zob, zoé, zoo, zou, zut, zup.
Mots de quatre lettres
azur, binz, chez, czar, gaze, gunz, jazz, jeze, lutz, mézé, naze, nazi, onze, ouzo, peze, quiz, ranz, tzar, witz, zain, zani, zarb, zébu, zèle, zend, zéro, zest, zeta, zinc, zire, zist, zizi, zona, zone, zoom, zouk, zozo.
Mais qu'est-ce donc que tous ces mots veulent dire ?
fez, coiffure tronconique de laine rouge et blanche que portent encore parfois les Musulmans. Elle peut être ornée d'un gland ou d'une mèche de laine ou de soie.
lez, lès ou le, mot vieilli que l'on trouve encore dans des noms de lieux, près de, à côté de. Plessis-lez-Tours, Plessis près de Tours
ruz, vallée du Jura
zec, zone de chasse et de pêche contrôlée par l'état au Québec
zee, poisson, le Saint-Pierre, délicieux mais pas bon marché !
zef, le vent, zéphir
zek, prisonier du goulag
zen, secte bouddhique du Japon
zig, zigue, zigomar, zigoteau, zigoto
zob. Vous ne voulez pas que je vous fasse un dessin ?
Zou ! Du vent ! Interjection
zup, zone à urbaniser par priorité
czar, tsar, tzar
gunz, première grande glaciation alpine du quaternaire
jeze, familier pour jésuite, nom et adjectif
lutz, en patinage artistique, saut piqué
mézé, mézzé, amuse-gueule grec, libanais ou turc
naze, familier, cassé, hors d'usage. Ta bagnole est naze.
Je suis naze, je suis crevé.
naze, nase, en argot : le nez
J'en ai plein le naze.
ouzo, liqueur d'anis d'origine grecque
pèze, en argot argent, pépètes ou pépettes
ranz, air populaire des chants suisses
witz, une plaisanterie chez les Helvètes
zain, robe de couleur uniforme du cheval ou du chien qui n'a aucun poil blanc.
zani ou zanni, bouffon de la comédie vénitienne
zarb, zarbi, bizarre en verlan
zend ou zende se dit de la langue des textes sacrés du mazdéisme
zest, être entre le zist et le zest, être indécis
zest ! ou zeste ! Interjection. Me voilà rendu, zest(e) !
zêta, dzêta, le z grec
zire, faire zire, en Acadie : dégoûter
zoé, certains crustacés en forme de larves
zouk, danse et fête antillaise
VOIR
Les petits mots avec :
>>137 Délires sur la guérison souhaitable ...
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