→ LES DÉLIRES Tous les épisodes
Nous arrêtâmes nos pas dans un vaste enclos où paissaient des ruminants pacifiques. Les abeilles, séduites par les fragrances florales, échevelaient les pistils et s'enivraient de nectar. Nous avions atteint une terre promise, un pays de lait et de miel1. Il fallut que nous bussions à même les pis et que nous suçassions les rayons de cire des essaims, gorgés et dégouttant de leur trésor melliflu. Nous devisâmes gaiement* avec les hyménoptères généreux qui renoncèrent à planter irrévérencieusement leur dard dans l'épithélium de mon corps glabre, donc exposé. Des chevaux alezan clair nous firent fête. Nous leur causâmes en hennissements aigus. L'herbe était vert tendre et nous servit momentanément de couche moelleuse.
—J'ai la berlue ! s'écria un vilain à la mine patibulaire. Que faites-vous là mes belles, et laquelle attraperai-je ?
La laie quitta les lieux prestement.
—Vêtez-moi décemment et sur-le-champ ! rétorquai-je.
Interloqué par mon air de défi et mon ton péremptoire, il me céda sa houppelande crottée. Je m'y enveloppai, tenant la dragée haute à l'hurluberlu hébété. Il disparut, dépité.
Que je perçusse l'ululement2 de l'effraie ne vous étonnera guère. La nuit tombait. Je me sentis seule. J'appelai la laie. Me revint à l'ouïe une cacophonie étonnante :“Laie... lai... laye... laid... lais... lé... les... lez... lei...”
Qui l'eût dit ? Qui l'eût cru3 ! Que l'écho fut pourri ? Que la laie fut perdue ?
..................................................
1-Allusion biblique.
2-l'ululement ou le hululement, pas d'élision devant le H ASPIRÉ
3-On pense au Cid de Corneille et aux cris déchirants des deux amants qui vivent un amour impossible.
—Rodrigue qui l'eût cru ?
—Chimène qui l'eût dit ?
>> PIERRE CORNEILLE - Le Cid - Acte 3 Scène 4 - Va, je ne te hais point. - Rodrigue qui l'eût cru ?
NOTES
Les abeilles, séduites par les fragrances florales
flagrance, odeur agréable, parfum.
Nous avions atteint une terre promise
atteint, participe passé du verbe atteindre.
VERBES EN DRE
Règle générale : aux 3 personnes du singulier du présent de l'indicatif, on a DS DS D
Je couds, tu étends, il prend, il moud
Participe passé : (j'ai) cousu, étendu, pris, moulu.
MAIS
VERBES EN INDRE ET SOUDRE,
au présent de l'indicatif, on a S S T
J'éteins, tu résous, il atteint, j'enfreins.
Participe passé : (il a) éteint, atteint, peint, feint, enfreint, ceint, craint, absout etc.
Mais (il a) résolu...
> Les verbes difficiles conjugués à l'indicatif présent...
*nous devisâmes gaiement
gaîment, ou gaiment (orthographe modifiée 1990)
>> Réforme de l'orthographe - L'orthographe recommandée aux enseignants - Lexique
les essaims dégouttant de leur trésor melliflu
► qui dégouttaient
du verbe dégoutter (de goutte).
homonyme homophone : dégoûtant
► Melliflu, ou meliflu / melliflue, qui fait du miel, sucré comme le miel, douceâtre.
melliflue sens figuré, péjoratif, vieilli (le e final n'est pas la marque du féminin)
Une parole melliflue. Un discours melliflue (ou melliflu). Un langage mellibflue, doucereux, sirupeux.
[ils] renoncèrent à planter leur dard dans l'épithélium de mon corps glabre, donc exposé
► notre corps est couvert de cellules épithéliales, celles de la peau.
► glabre, sans poils.
J'ai la berlue°
La berlue : Lésion de la vue, dans laquelle on perçoit des objets qui ne sont pas réellement devant les yeux, tels que des insectes, des mouches, des toiles d'araignée, etc.
Fig. Avoir la berlue, mal voir ; se faire une fausse idée d'une chose. Ceux qui la verront croiront avoir la berlue.
Cf. Dictionnaire Littré
Des chevaux alezan clair, une herbe vert tendre
L'ADJECTIF DE COULEUR, quand il est précisé par un deuxième adjectif ou par un nom, est invariable.
Des chandails bleu pâle, des joues rouge vif.
Remarque : Les noms employés comme adjectifs de couleur sont invariables. Des yeux marron.
Exceptions - Sont variables les adjectifs : rose, mauve, pourpre, écarlate.
Des lilas mauves, des joues roses...
♦ Vous aimez les couleurs ?
Vêtez-moi décemment
vêtir, Impératif, vêts, vêtons, vêtez.
Les adverbes en -MENT + Quiz 109
décent, décemment
VERBES se terminant pas IR
Comment savoir s'ils appartiennent au 2ème ou au 3ème groupe ? Chercher leur participe présent.
S'il se termine par ISSANT, c'est un verbe du 2ème groupe : punir, punissant (2ème)
Cueillir, cueillant, vêtir, vêtant (3ème groupe)
Homophones / Paronymes :
> QUIZ - Homophones/paronymes – Compléter avec l'ai l'aie l'aies l'ait l'aient l'es l'est l'ais les lait laie lai lais lé lez lei laid - Les trois copines - Dans le petit bois de Parcimoneilles (épisode 3)
-la laie, femelle du sanglier
-la laie ou le layon, espace déboisé rectiligne
-le lai, poème lyrique ou narratif du moyen âge, Le Lai du Chèvrefeuille de Marie de France qui évoque l'amour de Tristan et Iseut que même la mort ne peut séparer
-la laye, partie de l'orgue
-lai, servant, convers, qui se consacre aux travaux manuels dans un couvent, frère lai, soeur laie
-le lais, le legs, Les Lais des Testaments de Villon
-le lé, bande de tissu ou de tapisserie
-lez, près de, Plessis-lez-Tours -
-le lei (pluriel leu) monnaie roumaine.
-laid, pas joli joli.
Qui eût (aurait) cru que l'écho fut (était) pourri ?
► eût cru, subjonctif plus-que parfait à valeur de conditionnel passé (2e forme)
► fut, passé simple
<< 6 Délires inconsidérés - Je n'en peux mais !
>> 8 Délires zoologiquement inattendus -Comme un cheveu sur la soupe°