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11 décembre 2011 7 11 /12 /décembre /2011 19:07

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FLORILÈGE – Textes d'auteurs

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 Un florilège de textes sélectionnés par mamiehiou

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-15-

 

Lucifer

Entrée dans le :

 

Dictionnaire de la conversation et de la lecture

 

William Duckett (1805-1873)

Journaliste français

célèbre pour son dictionnaire encyclopédique

 

LUCIFER, que les Hellènes1 appelaient Phosphore, était fils de Jupiter (la pluie ou la rosée) et de l'Aurore. Ces deux noms, l'un latin, l'autre grec, signifient porte-lumière. En effet, revêtu d'une douce et candide lumière, ce charmant génie figure dans le ciel oriental la belle étoile du matin, compagne et messagère de l'astre du jour, qu'elle suit du levant au couchant par une éternelle attraction, phénomène que les anciens, avant Newton, appelaient amour. Aussi Vénus, ou Astarté, qui était la même déesse chez les Phéniciens, fut-elle une de ses appellations. On pensait qu'elle était la productrice des rosées : dès lors, on en fit la déesse de la génération. La mythologie persane en a formé une Vénus-Uranie2, sous le nom harmonieux d'Anahid, la chaste étoile d'orient. Cette étoile est Vénus (v.), brillante planète inférieure, la plus voisine de la terre, et qui tourne autour du soleil, dont elle est éloignée de 25 millions de lieues. Visible trois ou quatre heures, elle luit avant le lever et après le coucher de cet astre, tour à tour, comme lui, sur l'horizon oriental et occidental. Les anciens, les Chaldéens sans doute exceptés, la prenaient pour deux étoiles différentes ; ils la nommaient Hesper ou Vesper, l'occidentale, à son apparition du soir. Les modernes l'appellent l'étoile du berger, parce qu'elle est pour celui-ci le signal de la retraite dans les beaux jours ; et les cœurs tendres, l'étoile des amants, dont elle est le discret et mystérieux flambeau. L'ardente imagination des Grecs peuplant de divinités le ciel et la terre, donnant à tout une âme, un corps, un office, représenta Lucifer comme le conducteur des astres. C'est lui, selon eux, qui attelait, aidé des Heures couronnées de palmes droites sur le front, les chevaux de feu du Soleil au char de ce dieu, qu'il précédait lui-même, une étoile sur la tête, doucement emporté comme la Diana-Lucifera, la lune, par deux coursiers aux blanches crinières, qui ont donné à l'Aube ou Alba (la Blanche) son doux nom. En effet, dit, en analysant les teintes du jour naissant, l'auteur des Harmonies de la nature : « D'abord, une blancheur s'élevant au-dessus de l'horizon se décompose en différentes nuances de jaune qui parvient au jaune doré ; puis ce jaune doré, relevé d'un peu de vermillon, forme la couleur de l'aurore proprement dite, s'élevant ensuite par différentes teintes de rouge jusqu'au carmin, au zénith. » Ainsi, l'observation simple de la nature, chez les anciens, suppléait à l'analyse et aux fourneaux de nos physiciens. Le mythe grec fut depuis copié par les mythes indoustans. À Lucifer, le chef de l'armée mélodieuse des étoiles, ils substituèrent une chaste vierge dont nous avons parlé plus haut, la belle Anahid, créature accomplie. Vainement des génies ravissants de jeunesse et d'amour tendirent des pièges à cette vertu éthérée ; dans leur admiration, ils la transportèrent au centre de l'étoile du matin, d'où elle règle les chœurs des astres aux sons harmonieux de sa lyre. Les chevaux de main, que les Latins nommaient desultorii, étaient consacrés à Lucifer : ces fiers animaux furent aussi en grande vénération chez les Perses, qui les sacrifiaient au soleil, comme n'ayant point de plus nobles victimes à lui offrir. Job appelle Lucifer, ou l'étoile du matin, Boker, textuellement en hébreu le petit jour, et ailleurs Khima, que plusieurs prétendent être les Pléiades. Saint Jérôme traduit par Lucifer le mot sakar (aurore) du psalmiste, qui dit, en parlant au Verbe par la voix de Jéhovah3 : Ante Luciferum genui te (je t'ai enfanté avant Lucifer). Sakar, en hébreu, signifie tirant sur le noir, parce que, en effet, l'aurore est le crépuscule du matin ; et c'est avec la même justesse d'image que nous appelons celui du soir la brune. Le Christ* est quelquefois nommé dans les saintes écritures Lucifer, allusion à la lumière spirituelle qu'il est venu apporter au monde. Enfin, dans Isaïe, selon des talmudistes (interprètes), Lucifer était le plus beau et le plus brillant des esprits de lumière que Dieu ait créé, celui qu'il plaça dans la sphère paisible de l'étoile du matin, et qu'il vêtit des candides rayons de cet astre. Tombé du ciel depuis sa révolte contre son créateur, dans la nuit infernale, il frémit à cette interrogation du Voyant, qui, l'œil tourné vers le firmament oriental, son ancien palais, s'écrie d'une voix sombre :

 

Du haut de ton ciel pur, de la voûte éclatante,
Comment es-tu tombée, étoile éblouissante ?

 

D'abord, riant et frais comme l'Aurore sa mère, après toutes les malheureuses phases qu'il eut à subir dans nos légendes, Lucifer devint un objet de terreur. Cette appellation brillante fut depuis le titre tristement mémoratif de sa primitive splendeur, du prince des ténèbres, de satan, du diable, puisqu'il faut l'appeler par son nom. Écoutons La Fontaine, dans sa fable si poétique, si funèbre, de L'Ivrogne et sa femme :

 

Là-dessus son épouse, en habit d'Alecton,
Masquée, et de sa voix contrefaisant le ton ,
Vient au prétendu mort, approche de sa bière,
Lui présente un chaudeau propre pour Lucifer ;
L'époux alors ne doute en aucune manière,
Qu'il ne soit citoyen d'enfer.

 

À ce seul nom de Lucifer, les enfants poussent des cris d'effroi, et nos dévotes sont saisies de tremblement et d'horripilation, depuis que notre Jacques Callot4 a forcé ce roi des rois des pays bas du globe à venir poser devant son grotesque burin. Qui d'entre eux se sent assez de courage pour lever les regards sur la seule représentation de cet ennemi du genre humain par ce graveur-poète, sur ces cornes de bouc, ces cheveux roussis, ces yeux dont deux charbons ardents sont les prunelles, cette bouche de faune, ces ongles d'oiseau de proie, cette chair de cuivre, ces pieds couleur de feu, où sont entées des griffes ; et surtout cette queue immonde, et ce bras démesuré qui balance une fourche, avec laquelle incessamment il remue les damnés dans des chaudières d'huile bouillante ? Mais il était réservé au sublime et sombre Milton5, génie qui participait du ciel et de l'enfer, de porter un indicible et involontaire effroi dans les âmes les plus vigoureuses par cette peinture gigantesque de l'ange des ténèbres, débris vivant d'une sphère étoilée, et pour lequel le nom de Lucifer n'est plus qu'une sanglante épigramme : « Son bouclier pesant, d'une trempe éthérée, massif, large et rond, est suspendu derrière son dos ; on voit cette vaste circonférence pendre sur ses épaules comme l'orbe de la lune ; et sa lance est égale en hauteur au plus haut pin, coupé sur les rocs de la Norwége, destiné à être le grand mât de quelque vaisseau amiral. » Qu'il est beau, enfin, d'entendre cet ange rebelle, après sa chute d'un empyrée, rugir fièrement ce vers :

 

Better to reign in hell than serve in heaven.

Il vaut mieux régner dans les Enfers que d'être esclave aux Cieux.

.......

Notes de mamiehiou :

 

*Lucifer, "Porteur de lumière" a désigné Jésus, le Christ, pendant les premiers siècles après J.C.

Lucifer a désigné Satan à partir du Haut Moyen Âge. (Traduction de la Bible de l'hébreu en latin par saint Jérôme : La Vulgate - fin XIVe- début XVe siècle, premier livre imprimé par Gutenberg)

 

1Les Hellènes, les anciens Grecs

 

2Vénus-Uranie

[...] Or Mitra ou Anahid ou Anaïtis sont une seule et même déesse, l'étoile du matin ou le génie qui est supposé l'habiter, génie femelle qui préside à l'amour, qui donne la lumière, qui réside aux cieux, la Diana phosphora des Grecs, la Vénus-Uranie [ou Céleste] d'Hérodote,l'Athene ou l'Arthemis Persica de Strabon, Zaretis ou Sohre, qui dans la mythologie des Persans modernes, dirige la marche harmonieuse des astres avec les sons de sa lyre dont les rayons du soleil forment les cordes. (Soukra, la planète de Vénus chez les Hindous) 

Cf. "Religions de l'antiquité considérées principalement dans leurs formes symboliques et mythologiques", par Georg Friedrich Creuzer, J.D. Guigniaut, 1825. Pages 731, 732.

 

3Jéhovah

Le tétragramme (quatre lettres) hébreu YHWH (יהוה)

ne comportant pas de voyelles, on ne connaît pas la véritable prononciation du nom de Dieu, celle-ci s'est perdue dans la nuit des temps.

Histoire. Les Hébreux s'interdirent de prononcer le nom de Dieu puisque le troisième commandement était : « Tu ne prononceras pas le nom de YHWH en vain... »

Les prêtres ne prononçaient le nom de Dieu dans le Temple de Jérusalem qu'en deux occasions : le Grand Prêtre, dans le Saint des Saints, le jour de l'Expiation, et les prêtres, dans l'enceinte du Temple, lors des bénédictions au peuple, chaque matin.

Un Juif lit   Adonaï lorsqu'il rencontre le tétragramme.

Le chanoine Augustin Crampon (1826-1894), traducteur et exégète de la Bible conserva la transcription  Jéhovah en combinant les consonnes du tétragramme YHWH avec les voyelles du mot hébreu  Adonaï (« Seigneur »)

La Bible de Jérusalem donne Yahvé.

L'Église Catholique préconise aujourd'hui l’appellation « le Seigneur » pour YHWH. 

 

4Jacques Callot, 1592-1635, dessinateur et graveur lorrain fut célèbre pour ses gravures et ses eaux-fortes.

Entre autres oeuvres, Lucifer sur son trône dans les Enfers.

 

5John Milton, 1608-1674, écrivain britannique fit apparaître Satan qu'il nomme aussi Lucifer dans son célèbre long poème en vers Paradise Lost - Le Paradis perdu. Gustave Doré illustra le livre.

 

La chute de Lucifer, Gustave Doré.
(emprunt à Wikipédia)

 

.......

Lucifer du latin lux, lumière et de ferre, porter, apparaît dans la Vulgate (la Bible traduite en latin par saint Jérôme, 347-420) dans le livre d'Hénoch. Il est l'Archange déchu puni par Dieu pour son orgueil. Il entraîna dans sa chute d'autres anges qui devinrent les démons.

.......

« Comment es-tu tombé des Cieux
Astre du Matin, fils de l’Aurore
Comment as-tu été jeté par terre
Toi qui vassalisais toutes les Nations
Toi qui disais en ton cœur :
J’escaladerai les Cieux par-dessus les étoiles de Dieu
J’érigerai mon trône, je siégerai sur la montagne de l’assemblée, dans les profondeurs du Nord,
Je monterai au sommet des nuages noirs
Je ressemblerai au Très Haut
Comment ! Te voila tombé au Schéol, dans les profondeurs de l’abîme »
ISAÏE XIV : 12-15

Esaïe ou Isaïe

.......

Le Paradis Perdu de John Milton, texte en anglais : 

Paradise Lost  by John Milton

 

Traduction de François-René de Chateaubriand du Paradis Perdu de John Milton.

Sur Wikisource : Livre I et suivants 

 

Retrouvez cet article de William Duckett dans Google Books : 

Volume 36 - Lucifer page 46

 

Tous les volumes :

Dictionnaire de la Conversation et de la Lecture - William Duckett - Tous les volumes (lien Books-Google)

 

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