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3 février 2018 6 03 /02 /février /2018 09:18

LES DÉLIRES Tous les épisodes

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Si contents de nous retrouver, nous nous fondîmes en embrassements.

Notre émotion passée, je m'enquis de Marie Cratère qui n'avait pas surgi sur le pas de la porte comme j'aurais pu m'y attendre.

Prétatou fut pris alors d'une excitation hors norme. Était-ce de l'allégresse ? J'aurais pu m'y tromper à le voir sauter et gesticuler comme un beau diable.

"Marie Cratère n'est plus ! s'exclama-t-il avec emphase. La senescence a fait son oeuvre. Elle a clamsé.

Incroyable ! Extraordinaire ! Inconcevable ! Inimaginable ! Les mots me manquent, Prétatou, les mots me manquent. Est morte celle qui ne pouvait pas mourir ! Stupéfiant ! Renversant ! Impensable !

C'était dans l'ordre des choses, ma petite Oli. Tout ce qui vit sur terre doit un jour disparaître, déclara sentencieusement Prétatou.

La vie ne sera plus ce qu'elle était, ajoutai-je comme une évidence.

Elle ne cueillera plus la gentiane au suc amer, la prêle à collerette, la camomille romaine, la bardane aux capitules crochus...

Ni l'aunée, ni l'achillée millefeuille, ni la sauge officinale, ni le thym, ni le serpolet, non plus la mauve, ni la guimauve, ni même la reine-des-prés, ni la chélidoine qu'on appelle aussi grande éclaire, ni l'ortie blanche, ni le pissenlit, ni la dent-de-lion...

Aucune de ces plantes dont elle détenait le secret...

Ni la timide violette, renchérit Prétatou, ni la capucine orangée, le cresson poussé près de la source, ni le basilic, ni le romarin, ni la sarriette, ni le laurier-sauce dont elle n'utilisait les feuilles que séchées, entends-tu Oli, que séchées ! ni l'ail, ni l'oignon, ni le persil qui maintiennent le corps en si bonne forme...

Son grand âge a eu raison d'elle malgré les infusions, les décoctions, les baumes et les onguents qu'elle usait avec circonspection.

Elle s'est éteinte !

Elle a expiré !

Elle a succombé !

Elle a trépassé !

C'en est fait de ses bienfaits !

Nous pensâmes fortement qu'à partir de ce moment précis, il allait falloir nous débrouiller sans elle, tout seuls. Tout seuls !

 .....................................................................................

Notes

Elle a clamsé

Elle est morte

Clamser (argot), clamecer, cramser, crampser, calancher, claboter, claquer, crever...

<< 195 Délires d'une amitié retrouvée


 

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1 août 2017 2 01 /08 /août /2017 15:24

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Je me sentais bien démunie pour venir en aide à mes congénères et toute cogitation eût été vaine. Il me fallait un mentor, un conseil, un guide, pour me montrer la voie. C'est alors que je pensai à Marie Cratère, celle qui m'avait témoigné un attachement jaloux, parfois si sulfureux que je l'avais enduré au risque d'y perdre la vie. Elle seule avait les clefs pour nous sortir de l'enfermement dont nous étions victimes.

Je m'engageai résolument dans la forêt profonde.

Mes facultés hypermnésiques toujours aiguisées, je traçai mon chemin sans hésitations aucunes. Cette plongée sylvestre dans un lieu que j'avais maintes fois parcouru m'ôta mes angoisses trop longtemps contenues. Je respirai profondément les senteurs qui m'enveloppaient dans un fondu automnal, des parfums mêlés de mousse, d'humus, et d'ambre, des arômes subtils près de m'enivrer.

L'automne faisait son oeuvre et les feuilles doucement se détachaient des branches pour rejoindre à la verticale la terre végétale. Les oiseaux me reconnurent et chacun me lança son cri particulier. Je baignai bientôt dans une harmonie joyeuse de pépiements, de gazouillis, de piaulements, de roucoulements, chants ininterrompus de la gent ailée que je devinais tout juste dans les ramures.

Après quelques heures, je sus que j'étais près d'arriver à mon but, et soudain, à ma grande stupéfaction, je vis se précipiter à ma rencontre, mon bon chien Prétatou. L'émotion l'empêchait de me japper jovialement son bonjour et sa voix s'enrayait, hoquetait jusqu'à l'étouffement. Je le calmai d'une tendre caresse, trop heureuse de le retrouver.

« Tu as donc deviné que c'est ici que je devais revenir, cher Prétatou, toi que j'avais perdu dans la tourmente. Ne t'avais-je pas laissé au bord du gouffre d'où l'on ne revient pas ? Sache que je ne t'ai pas oublié et je n'aurais eu de cesse de te chercher que je ne t'eusse retrouvé.

Pauvre de moi, je suis resté en carafe. N'était l'amitié et la fidélité qui m'attachent à toi, ma chère Oli, il y a beau temps que je me serais trouvé un autre point de chute. Mais vois-tu, je t'ai attendue avec la patience sans faille dont seuls sont capables ceux qui me ressemblent. Et v’là-t’y pas que je te retrouve sans crier gare !

Je sais, je sais, mon ami : la patience est la vertu des forts et je te le dis tout à trac : tu n'as rien d'un estapafourbis. »

 .....................................................................................

Notes

toute cogitation eût été vaine

eût été, subjonctif plus-que-parfait à valeur de conditionnel passé du verbe être

toute cogitation aurait été vaine

Toutes mes pensées, mes réflexions n'auraient servi à rien.

Le cogito de Descartes : Cogito ergo sum (Le Discours de la méthode)

Je pense donc je suis.

 

Mes facultés hypermnésiques toujours aiguisées

Oli a une mémoire exceptionnelle.

 

je traçai mon chemin sans hésitations aucunes

Sans aucun : aucun peut suivre le substantif au lieu de le précéder

sans aucunes hésitations

 

Cette plongée sylvestre

cette immersion dans la forêt

 

chacun me lança son cri particulier

> 15 Délires pour un bestiaire. QUIZ 3 - Ces animaux qui nous parlent - Animals are such agreeable friends*

 

chants ininterrompus de la gent ailée

la gent ailée, le peuple des oiseaux.

1668 la gent trotte-menu [les souris] La Fontaine

La gent et pas la gente

> la gent, les gens, gentil, gentillesse, Gente Dame, un gentilhomme,, un gentleman, l'entregent, un Gentil, la gentilité

 

je suis resté en carafe

Rester en carafe, être oublié, rester en plan

 

N'était l'amitié et la fidélité qui m'attachent à toi

> Propositions conditionnelles commençant par : n'était, n'étaient, n'eût été, n'eussent été - Variations syntaxiques

La formule n'était tend à se figer. Le Bon Usage

 

il y a beau temps

il y a longtemps, ça fait un bail (argot), il y a belle lurette (populaire : vient de belle heurette), ça fait des lustres (un lustre dure cinq ans).

 

Et v’là-t’y pas que je te retrouve sans crier gare !

v’là-t’y pas, familier.

Voilà-t-il pas ou Ne voilà-t-il pas : marque la surprise

> Voici Voilà

sans crier gare - expression : sans prévenir, brusquement.

 

et je te le dis tout à trac

spontanément, franchement, sans détour

> Expressions françaises d'hier et d'aujourd'hui

 

tu n'as rien d'un estapafourbis

estapafourbis, mot que l'on m'assure se trouver dans le dictionnaire des mots sauvages de Maurice Rheims. Sommes-nous cosmopolissons, infinivertis, estapafourbis ?

Comprenne qui pourra !

<< 194 Délires surréels quoi qu'on en dise

>> 196 Délires impossiblement prévisibles

 

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28 juin 2017 3 28 /06 /juin /2017 15:27

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Le chaos que j'ai décrit plus haut ne laisse aucune place à l'humour dont veulent se parer parfois certains textes dramatiques. Nonobstant, vous entendez souventes fois : "On peut rire de tout ." Voire !

Je voudrais bien mentir et vous dire que toute cette histoire sort de ma tête en proie à une émotion qui trouble mon esprit. Ce faisant, je perdrais toute crédibilité et vous ne sauriez que jeter mon manuscrit aux orties. Vous souriez quand j'écris mon manuscrit. Mais c'est bien de manuscrit qu'il s'agit et je ne connais personne qui l'ait transcrit sur un autre support. Vous peut-être. Le parchemin que j'ai utilisé, objet durable s'il en fut, fait de peau de veau plutôt que de mouton ou de chèvre de peur qu'il n'empestât traversera les siècles sans dommage, à moins qu'il ne subisse fortuitement mais irrémédiablement l'épreuve du feu, et que sa trace soit perdue à jamais.

Il existe des mots qui portent en eux l'empreinte du Malin. "Le Diable se cache dans les détails". On n'y prend pas garde jusqu'à ce qu'ils révèlent brusquement leur portée maléfique.

 

Cher lecteur, dont la mémoire éidétique vous permet de vous rappeler chaque moment de mes pérégrinations commencées depuis longtemps déjà, ne vous laissez pas tournebouler par l'idée qui vient de vous traverser l'esprit comme l'éclair, et qui pourrait gâcher le reste de votre vie : mon histoire disparaîtra, comme toutes les histoires d'ailleurs, comme la vôtre, comme celles de toutes les civilisations.

Ne vous en déplaise !

Et ne croyez pas que le miracle d'internet aura lieu. Ses données, elles aussi se dissiperont comme vapeur.

Pardonnez-moi si je vous ai donné le babaud*. Arrêtez de broger* et passez à autre chose.

Votre Oli qui vous salue bien

 

PS. Je voulais mettre dans mon texte le mot géhenne mais la phrase dans laquelle je l'aurais inséré m'a manqué. L'évocation de la géhenne fait froid dans le dos et j'ai hésité longtemps avant d'écrire ce post scriptum qui n'ajoute rien à mon histoire. Vous apprécierez ou vous n'apprécierez pas, tout à votre guise.

...............................................................

Notes

Le titre : Délires surréels quoi qu'on en dise

surréels, qui semblent plus vrais que le réel ordinaire

> Ne pas confondre : quoique et quoi que

 

nonobstant, vous entendez souventes fois

nonobstant, ici adverbe concessif, synonymes : néanmoins, cependant, pourtant, pour autant, toutefois.

> Nonobstant - Ce nonobstant - Nonobstant que

Souventes fois, souventefois (vieilli), souvent.

 

"On peut rire de tout ." Voire !

Voire, emploi (vieilli) par antiphrase pour nier quelque chose ou exprimer un doute.

 

c'est bien de manuscrit qu'il s'agit

Il serait incorrect d'écrire : c'est bien de manuscrit dont il s'agit, parce que la préposition DE serait répétée (de, dont).

 

je ne connais personne qui l'ait transcrit

ait transcrit, subjonctif passé

> Valeurs et emplois du subjonctif

 

objet durable s'il en fut

s'il en fut : On insiste sur une vérité, une réalité.

Expression figée au passé simple. fut et pas fût !

 

de peur qu'il n'empestât

subjonctif imparfait

> De peur que

> NE explétif - Quand peut-on l'employer ? - sans que je ne - avant que je ne - je crains que tu ne - j'empêche que tu ne - je m'attends à ce que tu ne - je ne nie pas que tu ne...

 

"Le Diable se cache dans le détail."

"Der Teufel steckt im Detail." Friedrich Nietzsche

 

la mémoire eidétique vous permet de vous rappeler

La mémoire eidétique permet de se rappeler tout ce qu'on a vu, entendu et vécu. Cela suppose-t-il un hippocampe hypertrophié ?
 

Pardonnez-moi si je vous ai donné le babaud. Arrêtez de broger et passer à autre chose.

*Le babaud et broger appartiennent au parler gaga

Babaud, babeau ou babo : cafard.

Broger : broyer du noir.

> glossaire du parler gaga

 

Récapitulation des mots gagas que j'ai écrits dans ce blog

Voir la note qui suit le texte > Digression autour d'un mot : Se mistifriser

 

**géhenne

Vient du latin, gehenna, et de l'hébreu ge-hinnom, qui désigne la vallée profonde de Hinnom, près de Jérusalem. On y faisait des cultes idolâtres où l'on immolait des enfants. Ce lieu dégageait une odeur pestilentielle.

Le sens biblique de la géhenne désigne le séjour des réprouvés, les condamnés rejetés par Dieu. La géhenne, c'est l'enfer, là où les méchants iront après leur mort.

Un autre sens de géhenne : une torture infligée aux criminels, par extension, une souffrance intolérable.

 

<< 193 Délires où la désespérance n'aura nulle place

>> 195 Délires d'une amitié retrouvée

 

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24 juin 2017 6 24 /06 /juin /2017 17:50

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Après tous ces évènements fâcheux, nous fûmes fin prêts à reprendre confiance dans la vie. Chacun d'entre nous, ayant conservé une jeunesse à tous crins, voulait rebondir et faire table rase des dissensions, des discordes et des querelles qui avaient déchiré gravement, voire mortellement, notre communauté.

En étions-nous vraiment sortis indemnes ? Nul ne laissait paraître les séquelles dont il souffrait. Il eût été malavisé de nous plaindre en ressassant les déboires que nous avions subis.

Il fallait repartir à zéro et du bon pied aller de l'avant, reconstruire notre cité et nous débarrasser du joug intolérable qu'Utopinambourg subissait depuis trop longtemps. Mais comment combattre des oppresseurs retirés dans leur tour d'ivoire inatteignable ? Ce n'étaient pas des tyranneaux sans envergure qu'on aurait pu aisément renverser mais des persécuteurs sans scrupules qui avaient pris un malin plaisir à nous asservir. Ils se riaient de notre détresse. Les massacres auxquels ils avaient assisté leur semblaient quelques échauffourées fortuites incapables d'ébranler les fondements de leur puissance.

On sait que les maîtres d'Utopinambourg dirigeaient, du "Château", les tenants et les aboutissants de la cité, qu'ils en connaissaient les origines, l'avaient modelée à leur guise, et ils avaient la mainmise sur tous les citoyens, les privant impunément de la liberté de leurs actions et de leurs pensées.

Il eût fallu que nous nous munissions d'armes fabuleuses aux pouvoirs faramineux, comme Angurva, l'épée magique de Frithjof, l'anneau de Gygès qui nous eût rendus invisibles, l'armure d'Enée forgée par Héphaïstos, Al-Battar, l'épée de Goliath, Balmung, celle de Siegfried qu'on voit à l'oeuvre dans la Chanson des Nibelungen, Ascalon, l'épée avec laquelle Saint Georges terrassa le Dragon, et Hrunting l'épée d'Hadès ; Escalibur, celle du roi Arthur aurait fait l'affaire, Durandal aussi, l'épée de Roland, et même le couteau de Davy Crockett ; les sandales ailées d'Hermès nous auraient permis de voler et le bouclier de Lancelot d'effacer notre fatigue ; l'égide d'Athéna, flanquée de la tête de Méduse dont le regard pétrifie, nous aurait protégés et nous aurions écraser nos ennemis avec Mjöllnir, le marteau magique de Thor ; n'auraient pas été de trop le Foudre de Zeus fabriqué par les Cyclopes, avec ses trois éclairs le premier pour avertir, le deuxième pour punir et le troisième pour la fin des temps ni le trident de Poséidon, ni même les flèches mortelles d''Héraclès trempées dans le sang de l'Hydre de Lerne, à défaut Joyeuse l'épée de Charlemagne.

Mais nous n'avions rien de tout cela. Ni pour attaquer, ni pour nous défendre. De quoi désespérer de nous affranchir un jour. Dans un sursaut salutaire, nous bannîmes séance tenante toute velléité qui nous eût mis des bâtons dans les roues.

Haut les coeurs ! fut désormais notre cri de ralliement.

L'accès de révolte auquel nous venions de prendre part était les prémisses d'une prise de conscience. Assurément, nous n'allions pas en rester là.

 

Notes

Après tous ces évènements fâcheux nous fûmes fin prêts à reprendre confiance

événement ou évènement d'après la Nouvelle Orthographe.

> Réforme de l'orthographe - l'orthographe recommandée aux enseignants - Les règles - Lexique

fin prêts, tout à fait prêts (fin, invariable, est pris adverbialement)

Elle est fin prête à me gratifier d'un "j'aime" pour ma performance littéraire.

 

Chacun d'entre nous, ayant conservé une jeunesse à tous crins

ou à tout crin

une jeunesse à toute épreuve

On sait que les Utopinambourgeois ne vieillissent pas.

>> 92 Délires sur le désir de conserver sa jeunesse à tout prix - anima sana in corpore sano

 

faire table rase des dissensions, des discordes et des querelles

faire table rase, ne plus tenir compte de ce qui avait été auparavant.

 

des querelles qui avaient déchiré gravement, voire mortellement, notre communauté.

voire ou voire même ou même

> Second ou deuxième ? Voire ou voire même ? Que doit-on donc dire ?

 

En étions-nous vraiment sortis indemnes ?

N'en avions-nous pas été affectés ? Notre intégrité n'en était-elle pas atteinte ?

 

Il eût été malavisé de nous plaindre

malavisé, inconsidéré, irréfléchi.

eût été, subjonctif plus-que-parfait à valeur de conditionnel passé.

Il aurait été malavisé de nous plaindre

se plaindre, verbe pronominal. NOUS est un pronom réfléchi.

 

comment combattre des oppresseurs retirés dans leur tour d'ivoire inatteignable

Tour d'ivoire, lieu où s'isole quelqu'un qui refuse tout contact extérieur.

 

Ce n'étaient pas des tyranneaux sans envergure

des petits tyrans

C'est ou ce sont ? C'était ou c'étaient ? Ce sera ou ce seront ? Etc.

 

nous bannîmes séance tenante toute velléité qui nous eût mis des bâtons dans les roues

nous bannîmes, bannir au passé simple

séance tenante, sur-le-champ, aussitôt.

velléité, Littré : Volonté faible qui reste sans effet.

eût mis, subjonctif plus-que-parfait à valeur de conditionnel passé

toute velléité qui nous aurait mis des bâtons dans les roues

Mettre des bâtons dans les roues, gêner, empêcher la progression d'une action.

> Expressions françaises d'hier et d'aujourd'hui

 

Haut les coeurs !

Exclamation qui incite au courage. Soyons braves !

 

les prémisses d'une prise de conscience

le point de départ d'une prise de conscience

 

<< 192 Délires où point une faim de loup

>> 194 Délires surréels quoi qu'on en dise

 

 

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20 mai 2017 6 20 /05 /mai /2017 16:58

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Plût à Dieu que les Utopinambourgeois ne se fussent pas tous laissé berner et emberlificoter par les théories audacieuses mais mortifères, celles qu'alléguèrent abusivement les agitateurs sans vergogne. On périt beaucoup, comme il se doit dans les révolutions. Au moment où la violence atteignit son paroxysme, les plus réfléchis, dont je fus, se mirent à l'abri des chamaillis, sans risque d'être occis dans la mêlée. Un nombre de mes concitoyens, non négligeable bien qu'insuffisant à mon goût, furent épargnés.

 

Était-il possible que je me fusse sortie de cet enfer ? Je me le demande encore.

L'urgence était maintenant de nous trouver quelque chose à nous mettre sous la dent. Je pris à pleine main cette tâche qui me rappela la chère activité où j'excellai naguère et je décidai qu'il fallait d'urgence confectionner une brouchtoucaille bien faite pour caler les estomacs qui s'étaient mis à crier famine dans un glougloutement assourdissant.

On partit, séance tenante, à la recherche des victuailles qui menaçaient de se gâter dans les buffets, les dressoirs et les garde-manger. Les recoins de toutes les maisons furent inspectés pour traquer le moindre petit pois ; on sait bien qu'on en a toujours besoin chez soi.

Je m'appliquai à m'entourer de collaborateurs que je formai sitôt sur le tas. Nul besoin qu'ils connussent l'art des hâteurs, des maîtres queux ni des maîtres sauciers. Je me contentai que des marmitons missent la main à la pâte.

Comme ils étaient de bonne volonté, ils suivirent mes conseils à la lettre. On réussit tant bien que mal à se mettre quelque chose sous la dent.

On me félicita. C'était bon.

Tout fut dévoré en un tournemain.

...................................................

Notes

Titre : Délires où point une faim de loup

point (du verbe poindre, apparaître, se faire jour)

Poindre se conjugue comme joindre (il poignait, il poignit, poignant...).

synonyme pointer (apparaît, arrive) : Délires où pointe une faim de loup

 

Plût à Dieu que les Utopinambourgeois ne se fussent pas tous laissé berner et emberlificoter

Plût à Dieu, exprime un souhait, subjonctif imparfait.

Synonyme : Plaise à Dieu, subjonctif présent.

À Dieu ne plaise, formule que l'on dit lorsqu'on ne souhaite pas qu'une chose arrive, en espérant que Dieu fera en sorte qu'elle n'arrive pas.

Les Utopinambourgeois, habitants de Utopinambourg, l'étrange cité au mot valise : utopie-topinambour-bourg

Pour en savoir + lire l'arrivée d'Oli dans Utopinambourg. Oli, la narratrice, le personnage principal des Délires > 53 Délires d'une ville, la nuit

ils se sont laissé berner et emberlificoter, tromper et embrouiller.

Le participe passé laissé suivi d'un infinitif est invariable.

 

les idées audacieuses mais mortifères, celles qu'alléguèrent abusivement les agitateurs sans vergogne.

Mortifère, qui provoque ou entraîne la mort de nombreuses de personnes.

Les agitateurs alléguèrent des idées audacieuses, ils mirent en avant des faits, plus ou moins bien établis, pour tromper leur auditoire.

Sans vergogne, sans honte.

 

les plus réfléchis, dont je fus, se mirent à l'abri des chamaillis sans risque d'être occis dans la mêlée.

Chamaillis, Rare et littéraire, querelle, mêlée confuse accompagnée de tapage. Cnrtl

occis, tués. Le vieux verbe occire est défectif

> Les verbes défectifs - Pour peu qu'il vous en chaille !


 

Était-il possible que je me fusse sortie de cet enfer ?

fusse sortie, subjonctif plus-que-parfait.

> Valeurs et emplois du subjonctif §8

 

il fallait d'urgence confectionner une brouchtoucaille

Brouchtoucaille – Raymond Queneau

dans > Saint Glinglin / Gueule de pierre (nouvelle version) / Temps mêlés

Voir aussi > ipernity: La brouchtoucaille : une recette de cuisine très élaborée.

Brouchtoucaille, mot sauvage, comme l'appelle Maurice Rheims dans son Dictionnaire des mots sauvages. On y trouve aussi infiniverti, cosmopolisson, estapafourbi, empiricité, patrouillotisme, goncourtiser, féminotterie, envénitianiser...

 

les estomacs qui s'étaient mis à crier famine dans un glougloutement assourdissant.

Glougloutement, glouglou.

> Plus de 100 bruits et leurs nuances : bacchanal crépitation stridulation brondissement etc.

 

On partit séance tenante

sur-le-champ

 

on sait bien qu'on en a toujours besoin chez soi [des petits pois].

On se souvient de la publicité qui nous rebat les oreilles depuis les années 60 : On a toujours besoin de petits pois chez soi.

On pense à La Fontaine : Moralité de sa fable Le Lion et le rat : > On a souvent besoin d'un plus petit que soi.

 

Je me contentai que des marmitons missent la main à la pâte.

Littré - Se contenter que, avec le subjonctif.

Il ne faut pas dire se contenter de ce que.

 

Nul besoin qu'ils connussent l'art des hâteurs, des maîtres queux ni des maîtres sauciers

Hâteur, hasteur, (vieux) Rôtisseur au service d'un grand personnage.

Maître queux, grand cuisinier.

 

Tout fut dévoré en un tournemain.

En un tournemain, rapidement.

Vient de : en un tour de main c'est-à-dire le temps de tourner la main.

 

<< 191 Délires engendrés par de misérables tribuns

>> 193 Délires où la désespérance n'aura nulle place

 

 

 

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16 avril 2017 7 16 /04 /avril /2017 09:21

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L'heure du bilan avait sonné. Désastreux est un terme trop doux pour le qualifier ; cataclysmal serait plus près de la réalité.

On avait vu gesticuler toutes sortes de fous : des barjots, des cinglés, des branquignols, des timbrés, des farfelus, des détraqués, des dingues, des braques, des énergumènes excentriques, des toufous, des mabouls, des brindezingues, et même des fadas, des toc-toc, des hystériques, au pire des forcenés, des névrosés et des paraphréniques.

Je merdoierais immanquablement si je voulais décrire par le menu les exactions dont j'avais été témoin.

 

Il en avait plu des coups, des coups bas et des coups fourrés, des coups d'épée dans l'eau, des coups de boutoir, des coups de l'étrier, des coups de bambou, des coups de tête et des coups de poings, des coups d'essai et des coups de maître, des petits coups et même des grands coups, des coups de Trafalgar, des coups du Père François, des coups de coude et des coups de bec, des coups de talons et des coups de triques, des coups de poignards et des coups de pieds au cul qui n'avaient pas toujours atteint leur but. Les coups de foudre n'eurent pas leur place.

On dut reconnaître après coup que tout avait été inutile et vain.

On ne savait plus contre qui l'on s'était battu. On ne savait plus pourquoi l'on s'était battu.

On en était là.

Les Utopinambourgeois étaient décimés et ceux qui restaient, ébahis, ahuris, sidérés, médusés même, revenaient du cauchemar où ils avaient sombré. Ils comprirent qu'ils s'étaient fait amoustarder. Ils n'étaient pas fiers de s'être laissé emporter par les acrimonieuses paroles de leaders avides de semer partout la zizanie.

On avait été subjugué par l'habileté avec laquelle ces tribuns maniaient leur arme : la langue. Leurs belles paroles, enrobées de fiel, avaient engendré le pire.

La langue s'appelle langue parce qu'elle lèche. Elle lèche en flattant, elle mord en médisant, elle tue en mentant. Elle lie et ne peut être liée : elle est glissante et on ne peut la tenir : mais elle s'échappe et elle est trompée. Elle glisse comme l'anguille, elle pique comme une flèche... elle est douce et rusée, large et prête à épuiser le bien et à mélanger le mal. "Qui garde sa langue garde son âme : parce que la mort et la vie sont au pouvoir de la langue"*

 

Le calme revenu, on pansait ses plaies, on enterrait ses morts. Ce quoi faisant, on songeait déjà à se reconstruire.

 

Il avait été trop facile de se laisser berner. Et aujourd'hui encore nous nous laissons fasciner par l'éloquence de ceux qui disent nous vouloir du bien. Est-il à la portée de tous de rester vigilants ? Sommes-nous toujours capables de lucidité quand nous nous laissons emporter par les belles promesses de ceux qui n'ont qu'un seul but, inavouable du reste : le pouvoir ?

La manipulation mentale a encore de beaux jours devant elle.

.....................................................................................

*La langue s'appelle langue [...] "Qui garde sa langue garde son âme : parce que la mort et la vie sont au pouvoir de la langue" (Prov. XVIII, 21) Saint Bernard, TRAITÉ DE LA MAISON INTÉRIEURE, Chap. XXVII Des défauts et des abus de la langue

 

NOTES

Les Utopinambourgeois étaient décimés

décimer, faire périr en grand nombre.

(Vieilli) mettre à mort une personne sur dix.

 

les acrimonieuses paroles de leaders avides de semer partout la zizanie.

les paroles aigres, acerbes

 

Je merdoierais immanquablement si je voulais décrire par le menu les forfaits, les exactions dont j'avais été le témoin.

Merdoyer (populaire) s'embrouiller

Je m'embrouillerais inévitablement si je voulais décrire en détails les forfaits, les exactions

les exactions, les actes de violence

 

ceux qui restaient, ébahis, ahuris, sidérés, médusés même, revenaient du cauchemar

Médusé : le mot vient du nom Méduse, l'une des trois Gorgones dans la mythologie grecque. Les deux autres étant ses soeurs Euryale et Sthéno. Vous regardez ses yeux et elle vous pétrifie. (elle vous change en pierre). Sa chevelure est entrelacée de serpents.

 

Ils comprirent qu'ils s'étaient fait amoustarder.

Amoustarder (argot ancien) tromper, duper.

FAIT suivi d'un infinitif est invariable

L'accord problématique des participes passés FAIT et LAISSÉ - Ils se sont fait ou faits / Elle s'est fait ou faite / Ils se sont laissé ou laissés

 

l'habileté avec laquelle ces tribuns maniaient leur arme : la langue.

Un tribun, un orateur habile qui sait s'adresser à la foule.

Sens figuré : factieux qui cherche à soulever la foule en faisant semblant de défendre ses intérêts.

 

Leurs belles paroles, enrobées de fiel, avaient engendré le pire.

Fiel, synonyme de bile

Sens figuré : haine, animosité, humeur caustique - Littré

 

Ce quoi faisant, on songeait déjà à se reconstruire.

En faisant cela

 

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3 mars 2017 5 03 /03 /mars /2017 11:29

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Utopinambourg se soulevait et les clameurs enflèrent. On cria à la guerre civile. La situation me sembla désespérée lorsque les belligérants commencèrent à mettre la ville à sac. On entendit les vitrines voler en éclats, les voitures explosèrent, les pavés furent arrachés des chaussées et dressés en barricades. Méprisée désormais et huée, la police débordée recevait des coups que jamais elle n't pu concevoir. Les vociférations prenaient des sonorités jusqu'alors inouïes, des accents venus d'anciens pays de la terre entière. L’occitan, le gascon, le guipuscoan, le navarro-labourdin, le sanskrit, le vieux norrois, le féroïen, le norvégien nynorsk (landsmål) et le norvégien bokmål (riksmål), le gutnisk, le fingalien, le bas-francique, le brabançon, l'apulien, l'afrikaans, le thiois, le brandebourgeois, le francique ripuaire, le haut-alémanique, le gotique, l'anglo-normand, l'amharique, l'araméen, l'apaneca, l'arapaho, l'araucan, l'atikamekw, l'azéri, le bambara, le cachoube, et croyez-moi, j'en passe langues de tous les continents, langues mortes ou peut-être encore vivantes dans quelques coins qu'on a depuis longtemps oubliés.

 

Chacun criait sous l'émotion dans sa langue natale. On eût cru vivre en la Tour de Babel revenue du fond des âges.

Comment était-il possible que cette population cette populace, oserais-je dire si policée sous la férule tyrannique d'un gouvernement toujours à l'affût du moindre manquement, se fût si soudainement soulevée comme un seul homme ! Voulant s'affranchir du joug qui l'avait opprimée depuis des siècles, elle allait s'émanciper sans avoir conscience qu'elle aurait peut-être beaucoup à perdre dans cette entreprise périlleuse.

Les échauffourées se prolongèrent plusieurs jours, puis s'épuisèrent. On commença à manquer de tout.

Commencèrent alors à se faire entendre les plaintes des affamés et, tout en vrac, les lamentations, les gémissements, les pleurs et les soupirs. S'évanouirent les manières affectées qu'arboraient si bien les bourgeoises naguère endimanchées, corsetées de lames de baleine, au port superbe, arborant un air supérieur. Elles avaient cessé de fréquenter les atourneuses, les couturières et les modistes. Les cousettes furent les premières à chômer.

 

Du haut de sa colline le Château semblait épargné. Bien qu'il y eût pénurie de tout, on pouvait percevoir, par delà les ajours et les meurtrières, des lumières colorées accompagnées de musiques endiablées. On faisait la ribouldingue, on s'encanaillait, insensible aux malheurs du peuple. C'est bien là que les Princes dépensaient à gogo les impôts qu'on leur avait si chèrement payés.

........................................................................

NOTES

Titre : Délires qui tournent à la chienlit

La chienlit ou le chienlit : Le général de Gaulle a popularisé le mot au moment des troubles de mai 1968

"La réforme, oui ; la chienlit, non."

Chienlit, prononcer chiantlit – étymologiquement chie-en-lit

Action, manifestation désordonnée, tumultueuse et répugnante (Cnrtl)

 

les belligérants commencèrent à mettre la ville à sac

Les belligérants, ceux qui sont en guerre.

Mettre à sac : piller, dévaster, saccager.

 

la police débordée recevait des coups que jamais elle n'eût pu concevoir

eût pu subjonctif plus-que-parfait à valeur de conditionnel passé

> que jamais elle n'aurait pu concevoir

 

Les vociférations prenaient des sonorités jusqu'alors inouïes

Inouï - Littré : 1-Qu'on n'a pas ouï. 2-Dont on n'a jamais ouï parler. 3-Si extraordinaire, que jusque-là on n'avait ouï parler de rien de semblable.

 

On eût cru vivre en la Tour de Babel

On eût cru vivre > On aurait cru vivre

On peut lire dans le livre de la Genèse de la Bible le mythe de la Tour de Babel (Babylone) – Il fut un temps où tous les hommes ne parlaient qu'une même langue. Ils péchèrent par orgueil en voulant construire une tour pour atteindre le ciel. Dieu les punit en introduisant la confusion des langues.

« Tout le monde se servait d’une même langue et des mêmes mots. Comme les hommes se déplaçaient à l’orient, ils trouvèrent une vallée au pays de Shinéar et ils s’y établirent. Ils se dirent l’un à l’autre : Allons ! Faisons des briques et cuisons-les au feu ! La brique leur servit de pierre et le bitume leur servit de mortier. Ils dirent : Allons ! Bâtissons-nous une ville et une tour dont le sommet pénètre les cieux ! Faisons-nous un nom et ne soyons pas dispersés sur toute la terre ! Or Yahvé descendit pour voir la ville et la tour que les hommes avaient bâties. Et Yahvé dit : Voici que tous font un seul peuple et parlent une seule langue, et tel est le début de leurs entreprises ! Maintenant, aucun dessein ne sera irréalisable pour eux. Allons ! Descendons ! Et là, confondons leur langage pour qu’ils ne s’entendent plus les uns les autres. Yahvé les dispersa de là sur toute la face de la terre et ils cessèrent de bâtir la ville. Aussi la nomma-t-on Babel, car c’est là que Yahvé confondit le langage de tous les habitants de la terre et c’est de là qu’il les dispersa sur toute la face de la terre ». (Genèse, 11, La Bible de Jérusalem)

 

les bourgeoises naguère endimanchées, corsetées de lames de baleine

naguère, il y a peu, il y a peu de temps.

Une lame de baleine, d'acier, etc. sert à faire tenir droit le devant d'un corset, d'un corsage de robe. (synonyme : un busc qui a donné le mot buste)

 

Elles avaient cessé de fréquenter les atourneuses

Atourneuse – Littré : Femme qui faisait métier de coiffer, de parer, de louer des pierreries.

 

Les cousettes furent les premières à chômer.

Cousette, jeune ouvrière dans la couture.

 

on pouvait percevoir, par delà les ajours et les meurtrières

Ajour, petite ouverture laissant passer le jour, une petite fenêtre.

Meurtrière, dans un château fort, ouverture étroite d'où l'on peut tirer sur l'ennemi.

 

Bien qu'il y eût pénurie de tout

On emploie le subjonctif après la locution conjonctive Bien que

 

On faisait la ribouldingue

faire la ribouldingue, faire la noce.

Ribouldingue, débauche, beuverie, fête, ribote, bombe, bringue, java, noce, nouba.

 

C'est bien là que les Princes dépensaient à gogo les impôts qu'on leur avait si chèrement payés

les Princes : Les Princes qui nous gouvernent, ceux qui sont à la tête de l'état, qu'ils soient rois, présidents, premiers ministres, etc.

À gogo, sans restriction

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>> 191 Délires engendrés par de misérables tribuns

 

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12 février 2017 7 12 /02 /février /2017 18:23

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"Mes chers concitoyens," commençai-je...

Je doutai alors qu'on pût m'entendre dans le brouhaha ambiant.

Je me saisis d'un hautparleur tout juste posé là pour qu'on en fît usage en de telles circonstances. Et je repris : "Mes chers concitoyens, je vous conjure de reprendre vos esprits et de ne pas vous livrer à des actes que vous regretteriez aussitôt. La violence n'apportera pas de solution à notre cité. Établissons un gouvernement provisoire fait par le peuple et pour le peuple !"

Je me rendis compte que, sitôt prononcée, cette suggestion faisait écho à d'autres semblables, qui, par le passé, n'avaient pas toujours été suivies de politiques dignes d'être instaurées ; les politiquailleries étaient légion, quand ce n'étaient pas de véritables comités de salut public, comités de sinistre mémoire qui sévirent pendant la Révolution.

La situation ubuesque où je me trouvais me fit craindre pour ma vie. Des huées montèrent jusqu'à moi et s'amplifièrent. Je tremblai que l'état des choses n'allât de mal en pis. Tel le guignard* qui s'était envolé, je me sentis soudain si petite, si fragile, que je descendis promptement de ma tribune et je m'enfuis, me traitant moi-même de lâche. Non, je n'avais pas les épaules assez solides pour affronter une populace de coquefredouilles incapables de se maîtriser. À cet instant, je les eusse volontiers traités de veaux.**

.......................................

*Le guignard, voir la note dans 188 Délires héroïques

** "Les Français sont des veaux.” Charles de Gaulle

« Il l'a souvent employée [cette phrase] quand il les voyait ne pas réagir ou se considérer comme battus avant même d’avoir engagé le fer. Au début de juin 1940, par exemple, à Londres, à l’hôtel Connaught, à voix basse pour ne pas être entendu des convives qui dînent à la table voisine. Il vient de stigmatiser l’armistice au micro de la BBC. Je le vois alors serrer son couteau nerveusement avant de le reposer avec délicatesse. Puis il me souffle: «Ce sont des veaux. Ils sont bons pour le massacre. Ils n’ont que ce qu’ils méritent.» Philippe De Gaulle dans son livre "De Gaulle, mon père "

 

Notes

Titre : Délires d'une harangue qui fit long feu

une harangue, un discours fait devant une foule.

faire long feu : manquer son but.

Ne pas faire long feu : ne pas durer longtemps.

 

Je doutai alors qu'on pût m'entendre

Je doutai, passé simple, le temps du récit.

douter que est suivi du subjonctif

on pût : subjonctif passé

> Douter que, se douter que / Je doute que, nul doute que, il n'est pas douteux que... Je me doute que, il ne se doute pas que... + indicatif ou subjonctif ?

 

Je me saisis d'un hautparleur

un hautparleur ou un haut-parleur

 

les politiquailleries étaient légion, quand ce n'étaient pas de véritables comités de salut public, comités de sinistre mémoire qui sévirent pendant la Révolution.

Politiquailleries ou politicailleries, pratiques de politiques de bas étage.

Wikipédia - Comité de Salut Public - Du 22 prairial au 9 thermidor, c’est la Grande Terreur. Le 22 prairial, pour « déblayer » les prisons (le mot est de Barère), Couthon fait supprimer interrogatoire, défense et témoins. « Tout ce qui se passe est horrible, dit Saint-Just, mais nécessaire. » 1 285 condamnations à mort sont prononcées du 10 juin au 27 juillet.

 

La situation ubuesque où je me trouvais me fit craindre pour ma vie

Ubuesque : Par antonomase, vient du nom du personnage d'Alfred Jarry : le Père Ubu.

Qualifie une affirmation grotesque et démesurée jusqu'à l'absurde.


Tel le guignard qui s'était envolé, je me sentis si petite

ou Telle le guignard qui s'était envolé, je me sentis si petite

> Tel (accord)

 

pour affronter une populace de coquefredouilles incapables de se maîtriser

Coquefredouille

Dictionnaire Littré - Coquefredouille, pauvre hère, homme sans esprit.

Le Garde-mots - Il s’agit d’un mot injurieux dont l’étymologie est inconnue. Synonymes et mots voisins : bélître, canaille, chenapan, cuistre, faquin, fripouille, galapiat, gredin, gueux, homme de rien, malotru, maraud, maroufle, minable, misérable, mufle, niais, ostrogoth, pauvre type, paltoquet, pignouf, piteux, ringard, sans esprit, sot, vaurien.

 

je les eusse volontiers traités de veaux

j'eusse traité : subjonctif plus-que-parfait à valeur de conditionnel passé

je les aurais volontiers traités de veaux

traités : le participe passé s'accorde avec les, complément d'objet direct du verbe.

Récapitulation des articles sur l'accord des participes passés

 

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11 décembre 2016 7 11 /12 /décembre /2016 17:58

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À quoi eût servi de vitupérer contre le destin ? Tout, ici-bas, portait à croire que rétablir l'ordre dans ce monde bouleversé n'était plus possible. Mais l'on sait que bon nombre de révolutions passées, plus sanglantes qu'on ne puisse l'imaginer, ont éclaté, se sont paroxysées, puis, grâce à quelques hommes, plus déterminés et plus écoutés que les autres ont été étouffées, et se sont éteintes enfin, à coups de belles paroles ou de moyens que la morale réprouve.

Ainsi donc ont été renversées les règles établies par des gouvernements illégitimes, arbitraires et tyranniques.

Il ne s'agissait pas aujourd'hui d'une révolutionnette - loin de là - mais plutôt d'un souffle de vie qui devait faire sauter le joug subi depuis trop longtemps. Une clairvoyance, peu à peu, s'était insinuée dans les consciences. Peu préparées à l'esprit critique, elles s'étaient laissé berner, endoctriner, enfermer dans un modèle dont elles n'avaient pas la moindre idée. Tout avait été minutieusement combiné pour que nul ne soupçonnât qu'il était captif d'une pensée unique.

Toujours prête à vouloir le bonheur de mes semblables, je me déterminai à entrer dans l'action la plus téméraire, la plus improbable, celle qui devait changer la violence en douceur, l'inconséquence en raison, la révolte en paix, bref, la haine en amour.

Mais je me ravisai bientôt et songeai au pouvoir qui me faisait défaut. Qui étais-je pour former un voeu qui me sembla impossible dès l'instant qu'il embrasa mon imagination ? J'eusse volontiers fait l'éloge de ma folie* pour me convaincre que tout était réalisable si tant est qu'on eût la foi dans ses convictions.

Je me positionnai alors à la vue d'un grand nombre au milieu de la grande place d'Utopinambourg* que j'aurais bien appelée agora pour la circonstance.

"Il faut que je me bouscule les neurones !" m'écriai-je devant le désastre ambiant. J'enfonçai une porte ouverte en me chantonnant une rengaine appropriée à la situation : Tous les problèmes ont une solution... All problems have a solution... Für jedes Problem gibt es eine Lösung... Todos los problemas tienen solución... Una soluzione per tutti i problemi... soluție, la problemele... solução para os problemas... oplossing voor alle problemen... rozwiązania trudności... wszystkich problemów... løsning på de problemer... megoldás, problémák...

Se bousculaient les mots porteurs d'espoir. Je n'inventais rien. Ils avaient déjà fait leurs preuves en matière de problèmes résolus.

Me vint alors l'idée, que d'aucuns jugeraient saugrenue, de me hisser sur le beffroi déserté par les guetteurs qui avaient fui tous les risques inhérents à la situation du moment. Et me voilà, brandissant le drapeau blanc de la paix et chantant à tue-tête, telle une Sans-Culotte inspirée : « Ah ! ça ira, ça ira, ça ira, Le peuple en ce jour sans cesse répète, Ah ! ça ira, ça ira, ça ira, Malgré les mutins tout réussira. »

 

Il eût suffi d'une poignée d'hommes de bonne volonté, meneurs s'il en fut, capables de canaliser la fureur de tous les enragés et leur dessiller les yeux sur la vanité de leurs actions délétères.

Il eût fallu Sept Sages pour mettre de l'ordre dans le désordre, du calme dans l'agitation, de la vérité dans l'ignorance.

Vous l'aurez compris, je tâchais de rameuter, vaille que vaille, ceux qui me suivraient dans cette entreprise difficile. Je n'étais pas une inconnue dans ma cité. Ils étaient nombreux ceux qui m'avaient choisie pour guide lorsque je professais dans mon École, l'École de la bienséance*, là où je leur avais enseigné la politesse, les bonnes manières et tout l'art de se comporter du mieux qui soit avec ses semblables.

Bravant l'agitation et le tumulte, j'étais décidée à tout pour qu'ils se ralliassent à moi.

Alors que je m'apprêtais à haranguer la foule, un frêle guignard se posa sur mon épaule.

......................................................................

* L'Éloge de la folie (1508) par Érasme de Rotterdam, Desiderius Erasmus

* Retour en arrière : Oli arrive à Utopinambourg > 53 Délires d'une ville, la nuit

 

Notes

À quoi eût servi de vitupérer contre le destin ?

eût servi : subjonctif plus-que-parfait à valeur de conditionnel > aurait servi

Vitupérer, protester vivement

 

bon nombre de révolutions passées [...] se sont paroxysées,

Paroxyser (se), s'exacerber jusqu'à son paroxysme, son degré extrême

 

Me vint alors l'idée de me hisser sur le beffroi

Littré - Beffroi : 1-Tour dans laquelle est une cloche prête à sonner l'alarme. 2-La cloche même.

 

Il eût suffi d'une poignée d'hommes de bonne volonté, meneurs s'il en fut,

il eût suffi, subjonctif plus-que-parfait à valeur de conditionnel - il aurait suffi

s'il en est, s'il en existe - s'il en fut, passé simple.

 

leur dessiller les yeux sur la vanité de leurs actions délétères.

leur ouvrir des yeux, leur faire prendre conscience

Délétère – Littré : Fig. Qui cause corruption et mal moral.

ÉTYMOLOGIE- Terme dérivé du verbe grec signifiant détruire.

 

Il eût fallu Sept Sages pour mettre de l'ordre dans le désordre

Les Sept Sages, en référence aux Sages grecs.

LES SEPT SAGES - Encyclopædia Universalis

 

la grande place d'Utopinambourg que j'aurais bien appelée agora

Dans la Grèce antique, l'agora désigne la place publique où se rassemblait les citoyens qui débattaient des questions sociales, politiques et mercantiles de la cité.

Le forum dans l'antiquité romaine.

 

Bravant l'agitation et le tumulte, j'étais prête à tout pour qu'ils se ralliassent à moi.

Le tumulte de la foule

Plus de 100 bruits et leurs nuances : bacchanal crépitation stridulation brondissement etc.

ils se ralliassent, se rallier au subjonctif imparfait.

 

un frêle guignard se posa sur mon épaule

Littré : Le guignard est appelé par quelques-uns petit pluvier ; il est en effet d'une taille inférieure à celle du pluvier doré, et n'a guère que huit pouces et demi de longueur, [Buffon, Oiseaux. t. XV, p. 136]

D'après Ménage, cet oiseau a été ainsi appelé d'un nommé Jean Guignard, bourgeois de Chartres, lequel, le premier, en reconnut la délicatesse en 1542.

 

*L'École de la bienséance à retrouver dans les articles :

133 Délires sur des conduites peu exemplaires - "La politesse est à l'esprit ce que la grâce est au visage"

134 Délires d'Oli et de Lio – L'anagramme – Le chiasme

135 Délires pédagogiques

QUIZ 25 Test sur la politesse, le savoir-vivre et l'art de la table

137 Délires sur la guérison souhaitable et programmée de ceux qui n'hésitent pas à manquer gravement à la bienséance. L'École des Hommes

 

<< 187 Délires sans issue

>> 189 Délires d'une harangue qui fit long feu

 

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24 octobre 2016 1 24 /10 /octobre /2016 17:06

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J'en étais là de mon chemin semé de chausse-trapes, désenchantée, abîmeuse en douleur, et je me défublai à jamais de tout espoir.

J'avais cru m'approcher si près du but ; la déception était d'autant plus cruelle.

"Où fuir ? Où ne pas fuir ?"* me dis-je. "Devrais-je désormais comme le Juif errant ** parcourir les contrées, sans repos ? les contrées  que dis-je  l'espace clos, arrêté de murailles invisibles qui m'enserraient irrémédiablement, moi et les captifs ignorants du piège qu'un jour on leur avait tendu."

Je cherchais en vain l'ardeur qui m'avait animée pendant de si longs mois, en quête d'une échappatoire. Et soudain j'avais cru entrevoir une lumière ; elle était là, brillante, au bout d'un tunnel. Chimère ! J'avais été dupée, embabouinée. Tout me sembla illusoire, vide de sens, insupportable. À moi, il y a peu, la jeune fille au courage à tous crins. J'eusse abatailler les fantômes.

Prétatou m'avait rejointe lorsque j'étais ressortie de la caverne innommable, l'enfer ignominieux où les hommes se ravalent au niveau le plus bas, celui de l'esclave, celui de la bête, l'oppresseur n'étant que la contrepartie de l'opprimé, l'exigence impitoyable de l'un contrebalançant la docilité pitoyable de l'autre.

"Où fuir ? Où ne pas fuir ?"

Prétatou, la queue basse et le flair aux aguets, n'osait piper ; lui, si loquace, si disert en toutes circonstances, en avait perdu la voix. Qui l'eût cru ? J'esquissai un pâle sourire à son endroit. Il rabattit les deux oreilles sur ses yeux pour voiler son désabusement.

"No future" lâchai-je, trahissant sans vergogne ma langue natale.

Les bras m'en tombèrent. C'est à peine si je me reconnus.

.............................................................................

*"Où fuir ? Où ne pas fuir ?"

Où courir ? Où ne pas courir ? Molière


**Le Juif errant, personnage légendaire.

http://www.universalis.fr/encyclopedie/mythe-du-juif-errant/

Le Juif errant, roman de Eugène Sue 1844-1845

 

NOTES

Titre : Délires sans issue

Issue, issu, dérivés du verbe issir (vieux et rare) sortir.


J'en étais là de mon chemin semé de chausse-trapes, abîmeuse en douleur

Chausse-trape ou chausse-trappe, piège, embûche.

Abîmeux, abismeux en douleur, qui plonge dans la douleur - Cf. D.M.F. Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)


je me défublai à jamais de tout espoir.

S'affubler, s'habiller d'une manière bizarre, ridicule.

se défubler/desfubler, se désaffubler, enlever ce qui affuble.

 

en quête d'une échappatoire.

Une échappatoire - Littré : Excuse frivole, subterfuge pour s'échapper, pour sortir d'embarras.

 

J'avais été dupée, embabouinée.

Embabouiner, familier - embobeliner, embobiner, entortiller

 

la jeune fille au courage à tous crins

À tous crins, énergique, à toute épreuve

 

J'eusse abatailler les fantômes.

Abatailler, combattre - Cf. D.M.F.

J'aurais combattu les fantômes.

 

les hommes se ravalent au niveau le plus bas

Se ravaler, s'abaisser, s'avilir – Littré

 

Prétatou [...] n'osait piper

Piper, piper mot, dire un mot

 

Qui l'eût cru ?

Subjonctif plus-que-parfait à valeur de conditionnel passé

Qui aurait cru cela ?

>> L'enseignement du français n'est plus ce qu'il était. Money Drop, Le Cid, Mauriac.


"No future !" lâchai-je, trahissant sans vergogne ma langue natale.

Langue natale, langue maternelle.

Sans vergogne, sans scrupule, sans honte.

 

Les bras m'en tombèrent.

Familièrement. Les bras m'en tombent, ma surprise est extrême. Littré

 

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