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24 octobre 2011 1 24 /10 /octobre /2011 06:09

FLORILÈGE

 

                                                                                                                       .

   Un florilège de textes sélectionnés par mamiehiou

                                                                                                                        

 

 -10-

 

Le Roi Candaule

 

Théophile Gautier (1811 - 1872)  

 

Extrait du chapitre 5

 

Nyssia défit ensuite ses bracelets, mais ses mains, roidies par des contractions nerveuses, servaient mal son impatience. Elle rompit le fil d'un bracelet de grains d'ambre incrustés d'or, qui roulèrent avec bruit sur le plancher et firent rouvrir à Candaule des paupières qui commençaient à se fermer.

Chacun de ces grains pénétrait dans l'âme de Gygès comme une goutte de plomb fondu tombant dans l'eau. Ses cothurnes délacés, la reine jeta sa première tunique sur le dos du fauteuil d'ivoire. - Cette draperie, ainsi posée, produisit sur Gygès l'effet d'un de ces linges aux plis sinistres, dont on enveloppe les morts pour les porter au bûcher. - Tout dans cette chambre, qu'il trouvait la veille si riante et si splendide, lui semblait livide, obscur et menaçant. - Les statues de basalte remuaient les yeux et ricanaient hideusement. La lampe grésillait, et sa lueur s'échevelait en rayons rouges et sanglants comme les crins d'une comète ; dans les coins mal éclairés s'ébauchaient vaguement des formes monstrueuses de larves et de lémures. Les manteaux suspendus aux chevilles s'animaient sur la muraille d'une vie factice, prenaient des apparences humaines, et quand Nyssia, quittant son dernier voile, s'avança vers le lit, blanche et nue comme une ombre, il crut que la Mort avait rompu les liens de diamant dont Héraclès l'avait autrefois enchaînée aux portes de l'enfer lorsqu'il délivra Alceste, et venait en personne s'emparer de Candaule.

 

Texte complet :

Retrouvez des extraits de textes d'auteurs dans :

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FLORILÈGE - LA PENSÉE DES AUTRES (titres des textes)

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18 octobre 2011 2 18 /10 /octobre /2011 08:20

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Tome 1

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Louise Labé, la Belle Cordière

vers 1524 - 1566

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Baise m'encor, rebaise-moi et baise...

 

Baise m'encor, rebaise-moi et baise :

Donne m'en un de tes plus savoureux,

Donne m'en un de tes plus amoureux :

Je t'en rendrai quatre plus chauds que braise.

 

Las, te plains-tu ? ça que ce mal j'apaise,

En t'en donnant dix autres doucereux.

Ainsi mêlant nos baisers tant heureux

Jouissons-nous l'un de l'autre à notre aise.

 

Lors double vie à chacun en suivra.

Chacun en soi et son ami vivra.

Permets m'Amour penser quelque folie :

 

Toujours suis mal, vivant discrètement,

Et ne me puis donner contentement,

Si hors de moi ne fais quelque saillie.

 

Sonnet XVIII

 

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Pierre de Ronsard 

1524 - 1585

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Amourette

 

Or que l'hiver roidit la glace épaisse

Réchauffons-nous, ma gentille maîtresse,

Non accroupis près le foyer cendreux,

Mais aux plaisirs des combats amoureux.

Assisons-nous sur cette molle couche.

Sus ! baisez-moi, tendez-moi votre bouche,

Pressez mon col de vos bras dépliés,

Et maintenant votre mère oubliez.

Que de la dent votre tétin je morde,

Que vos cheveux fil à fil je détorde.

Il ne faut point, en si folâtres jeux,

Comme au dimanche arranger ses cheveux.

Approchez donc, tournez-moi votre joue.

Vous rougissez ? il faut que je me joue.

Vous souriez : avez-vous point ouï

Quelque doux mot qui vous ait réjoui ?

Je vous disais que la main j'allais mettre

Sur votre sein : le voulez-vous permettre ?

Ne fuyez pas sans parler : je vois bien

A vos regards que vous le voulez bien.

Je vous connais en voyant votre mine.

Je jure Amour que vous êtes si fine,

Que pour mourir, de bouche ne diriez

Qu'on vous baisât, bien que le désiriez ;

Car toute fille, encor' qu'elle ait envie

Du jeu d'aimer, désire être ravie.

Témoin en est Hélène, qui suivit

D'un franc vouloir Pâris, qui la ravit.

Je veux user d'une douce main-forte.

Hà ! vous tombez, vous faites jà la morte.

Hà ! quel plaisir dans le coeur je reçois !

Sans vous baiser, vous moqueriez de moi

En votre lit, quand vous seriez seulette.

Or sus ! c'est fait, ma gentille brunette.

Recommençons afin que nos beaux ans

Soient réchauffés de combats si plaisants.

 

Second livre des Amours

 

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Gérard de Nerval 

1808 - 1855

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El Desdichado

 

Je suis le ténébreux, le veuf, l'inconsolé,
Le prince d'Aquitaine à la tour abolie :
Ma seule étoile est morte,
et mon luth constellé
Porte le soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du tombeau, toi qui m'as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d'Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé,
Et la treille où le pampre à la rose s'allie.

Suis-je Amour ou Phébus ?... Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encore du baiser de la reine ;
J'ai rêvé dans la grotte où nage la sirène...

Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d'Orphée
Les soupirs de la sainte et les cris de la fée.

 

Les Chimères

 

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Alfred de Musset

1810 - 1857

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Chanson de Fortunio

 

Si vous croyez que je vais dire

― Qui j'ose aimer,

Je ne saurais, pour un empire,

― Vous la nommer.
 

Nous allons chanter à la ronde,

― Si vous voulez,

Que je l'adore et qu'elle est blonde

― Comme les blés.
 

Je fais ce que sa fantaisie

― Veut m'ordonner,

Et je puis, s'il lui faut ma vie,

― La lui donner.
 

Du mal qu'une amour ignorée

― Nous fait souffrir,

J'en porte l'âme déchirée

― Jusqu'à mourir.
 

Mais j'aime trop pour que je die

― Qui j'ose aimer,

Et je veux mourir pour ma mie

― Sans la nommer.

 

Poésies Nouvelles
 

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Henri de Régnier

1864 - 1936

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Odelette 2

 

Si j'ai parlé

De mon amour, c'est à l'eau lente

Qui m'écoute quand je me penche

Sur elle ; si j'ai parlé

De mon amour, c'est au vent

Qui rit et chuchote entre les branches ;

Si j'ai parlé de mon amour, c'est à l'oiseau

Qui passe et chante

Avec le vent ;

Si j'ai parlé

C'est à l'écho ;

Si j'ai aimé de grand amour,

Triste ou joyeux, Ce sont tes yeux ;

Si j'ai aimé de grand amour,

Ce fut ta bouche grave et douce,

Ce fut ta bouche ;

Si j'ai aimé de grand amour,

Ce furent ta chair tiède et tes mains fraiches,

Et c'est ton ombre que je cherche.

Les Jeux rustiques et divins 

 

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Charles Baudelaire

1821 - 1867

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L'Invitation au Voyage

 

Mon enfant, ma soeur,
Songe à la douceur
D'aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traîtres yeux,
Brillant à travers leurs larmes.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.

Des meubles luisants,
Polis par les ans,
Décoreraient notre chambre ;
Les plus rares fleurs
Mêlant leurs odeurs
Aux vagues senteurs de l'ambre,
Les riches plafonds,
Les miroirs profonds,
La splendeur orientale,
Tout y parlerait
À l'âme en secret
Sa douce langue natale.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.

Vois sur ces canaux
Dormir ces vaisseaux
Dont l'humeur est vagabonde ;
C'est pour assouvir
Ton moindre désir
Qu'ils viennent du bout du monde.
- Les soleils couchants
Revêtent les champs,
Les canaux, la ville entière,
D'hyacinthe et d'or ;
Le monde s'endort
Dans une chaude lumière.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.

 

Les Fleurs du Mal

 

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Jean-Paul Toulet

1867 - 1920

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En Arle

 

Dans Arle, où sont les Aliscamps
Quand l’ombre est rouge sous les roses,
            Et clair le temps,
 
Prends garde à la douceur des choses.
Lorsque tu sens battre sans cause
            Ton cœur trop lourd ;
 
Et que se taisent les colombes :
Parle tout bas si c’est d’amour
            Au bord des tombes.

 

Contre-rimes

 

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Louis Aragon

1897 - 1982

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Les yeux d'Elsa

 

Je ne peux pas publier ce poème que j'aime. L'oeuvre n'est pas encore tombée dans le domaine public, mais, en cherchant bien, vous pouvez trouver le texte sur la toile. 

 

Quand un ouvrage peut-il tomber dans le domaine public ?

Lire : Pourquoi Apollinaire a mis 95 ans pour entrer dans le domaine public

 

>> Voir aussi : Poèmes d'amour  Tome 1

>> Et d'autres textes d'auteurs dans "La pensée des autres"

 

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30 août 2011 2 30 /08 /août /2011 19:06

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Pierre de Ronsard

1524 - 1585

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Quand à longs traits je bois l'amoureuse étincelle

 

Quand à longs traits je bois l'amoureuse étincelle

Qui sort de tes beaux yeux, les miens sont éblouis :
D'esprit ni de raison, troublé, je ne jouis,
Et comme ivre d'amour, tout le corps me chancelle.

Le cœur me bat au sein : ma chaleur naturelle
Se refroidit de peur : mes sens évanouis
Se perdent dedans l'air, tant tu te réjouis
D'acquérir par ma mort le surnom de cruelle.

Tes regards foudroyants me percent de leurs rais
Tout le corps, tout le cœur, comme pointes de traits
Que je sens dedans l'âme : et quand je me veux plaindre,

Ou demander merci du mal que je reçois,
Si bien ta cruauté me resserre la voix,
Que je n'ose parler, tant tes yeux me font craindre.

 

Le premier livre des Sonnets pour Hélène, 1578

 

Lire aussi l'Ode à Cassandre dans la note des Délires n°65

Mignonne, allons voir si la rose...

 

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Victor Hugo

1802-1885

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Mon bras pressait ta taille frêle

 

Mon bras pressait ta taille frêle
Et souple comme le roseau ;
Ton sein palpitait comme l’aile
D’un jeune oiseau.

Longtemps muets, nous contemplâmes
Le ciel où s’éteignait le jour.
Que se passait-il dans nos âmes?
Amour ! amour !

Comme un ange qui se dévoile,
Tu me regardais, dans ma nuit,
Avec ton beau regard d’étoile,
Qui m’éblouit.

 

Les Contemplations, 1856

 

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Alphonse Daudet

(1840 - 1897)

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L'oiseau bleu

 

J'ai dans mon cœur un oiseau bleu,
Une charmante créature,
Si mignonne que sa ceinture
N'a pas l'épaisseur d'un cheveu.

Il lui faut du sang pour pâture
Bien longtemps, je me fis un jeu
De lui donner sa nourriture :
Les petits oiseaux mangent peu.

Mais, sans en rien laisser paraître,
Dans mon cœur il a fait, le traître,
Un trou large comme la main.

Et son bec fin comme une lame,
En continuant son chemin,
M'est entré jusqu'au fond de l'âme !...

 

Les Amoureuses

 

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Charles Cros

1842 – 1888

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Cueillette

C'était un vrai petit voyou,
Elle venait on ne sait d’où,
Moi, je l’aimais comme une bête.
Oh ! la jeunesse, quelle fête.

Un baiser derrière son cou
La fit rire et me rendit fou.
Sainfoin, bouton d’or, pâquerette,
Surveillaient notre tête à tête.

La clairière est comme un salon
Tout doré ; les jaunes abeilles
Vont aux fleurs qui leur sont pareilles ;

Moi seul, féroce et noir frelon,
Qui baise ses lèvres vermeilles,
Je fais tache en ce fouillis blond.

Le Panier de Griffes

 

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Stéphane Mallarmé

1842 – 1898

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Apparitions 

La lune s’attristait. Des séraphins en pleurs

Rêvant, l’archet aux doigts, dans le calme des fleurs
Vaporeuses, tiraient de mourantes violes
De blancs sanglots glissant sur l’azur des corolles.
— C’était le jour béni de ton premier baiser.
 

Ma songerie aimant à me martyriser
S’enivrait savamment du parfum de tristesse
Que même sans regret et sans déboire laisse
La cueillaison d’un Rêve au cœur qui l’a cueilli.
J’errais donc, l’œil rivé sur le pavé vieilli
Quand avec du soleil aux cheveux, dans la rue
Et dans le soir, tu m’es en riant apparue
Et j’ai cru voir la fée au chapeau de clarté
Qui jadis sur mes beaux sommeils d’enfant gâté
Passait, laissant toujours de ses mains mal fermées
Neiger de blancs bouquets d’étoiles parfumées.

Poésies, 1887

 

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Paul Verlaine 

1844 – 1896

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A poor young shepherd*

 

J'ai peur d'un baiser
Comme d'une abeille.
Je souffre et je veille

Sans me reposer.
J'ai peur d'un baiser !

Pourtant j'aime Kate
Et ses yeux jolis.
Elle est délicate
Aux longs traits pâlis.
Oh! que j'aime Kate !

C'est Saint-Valentin !
Je dois et je n'ose
Lui dire au matin...
La terrible chose
Que Saint-Valentin !

Elle m'est promise,

Fort heureusement !
Mais quelle entreprise
Que d'être un amant
Près d'une promise !

J'ai peur d'un baiser
Comme d'une abeille. 
Je souffre et je veille
Sans me reposer:
J'ai peur d'un baiser !

 

Romances sans paroles 1874

*A poor young shepherd = un pauvre jeune berger


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Arthur Rimbaud

1854 – 1891

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À... Elle

Rêvé pour l'hiver

 

L'hiver, nous irons dans un petit wagon rose
Avec des coussins bleus.
Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose
Dans chaque coin moelleux.
 
Tu fermeras l'oeil, pour ne point voir, par la glace,
Grimacer les ombres des soirs,
Ces monstruosités hargneuses, populace
De démons noirs et de loups noirs.
 
Puis tu te sentiras la joue égratignée...
Un petit baiser, comme une folle araignée,
Te courra par le cou...
 
Et tu me diras : « Cherche ! » en inclinant la tête,
- Et nous prendrons du temps à trouver cette bête
- Qui voyage beaucoup...
 
En wagon, le 7 octobre 1870. 

 

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Paul Géraldy

1885 – 1983

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Abat-jour

Toi et Moi

Je ne peux pas publier ce poème que j'aime. L'oeuvre n'est pas encore tombée dans le domaine public mais, en cherchant bien, vous pouvez trouver le texte sur la toile.
 
Quand un ouvrage peut-il tomber dans le domaine public ?
Lire : Pourquoi Apollinaire a mis 95 ans pour entrer dans le domaine public
 

>> VOIR Poèmes d'amour – Tome 2 - Florilège proposé par mamiehiou

>> Et d'autres textes d'auteurs dans " Florilège - La pensée des autres"

 

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30 juillet 2011 6 30 /07 /juillet /2011 16:38

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 Un florilège de textes sélectionnés par mamiehiou

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-9-

 

Mes mémoires

 

Alexandre Dumas (1802-1870)

 

Enfin on parlait de Géricault, absent, presque autant que de tous ceux qui étaient présents.

C'est qu'en effet, l'école nouvelle, qui attendait un chef, sentait que ce chef était en lui ; et, cependant, Géricault n'avait guère fait que des études. Il venait d'achever Le Hussard et Le Cuirassierque le musée a racheté dernièrement à la succession du roi Louis-Philippe – et il était en train de finir sa Méduse.

Pauvre Géricault ! Lui aussi, sa Méduse achevée, il devait mourir, et mourir douloureusement.

Huit jours avant sa mort, je le vis.

Comment avais-je connu Géricault ?

Comme j'ai connu Béranger et Manuel.

Dans mes dîners hebdomadaires chez Monsieur Arnault, j'avais bien souvent rencontré le colonel Bro, bon et brave soldat, à qui tout souvenir de l'armée était cher, et qui m'avait pris en amitié, par cela seulement que j'étais le fils d'un général de la Révolution.

[...]

Un jour qu'on avait parlé de Géricault, qui s'en allait mourant, Bro me dit : « Venez donc voir son tableau de La Méduse, et le voir lui-même, afin que, s'il meurt, vous ayez vu au moins un des plus grands peintres qui aient jamais existé. »

Je n'eus garde de refuser, comme on comprend bien. Rendez-vous fut pris pour le lendemain.

De quoi mourait Géricault ?

Écoutez, et voyez combien, parfois, l'homme a un signe fatal gravé à côté de son nom.

Géricault possédait quelque fortune, une douzaine de mille livres de rente ; Géricault aimait les chevaux, qu'il peignait si bien. Un jour, au moment de monter à cheval, il s'aperçoit que la boucle de son pantalon manque ; il lie les deux pattes et part au galop ; son cheval le jette à terre : il tombe sur le noeud, et le noeud froisse deux vertèbres de l'épine dorsale. Une maladie dont Géricault était en train de se traiter en ce moment vient faire de cette contusion une plaie, et Géricault, l'espérance de tout un siècle, meurt d'une carie aux vertèbres – c'est-à dire d'une maladie les plus longues et les plus douloureuses qu'il y ait !

Quand nous entrâmes chez lui, il était occupé à dessiner sa main gauche avec sa main droite.

Que diable faites-vous donc là, Géricault ? lui demanda le colonel ?

Vous le voyez, mon cher, dit le mourant ; je m'utilise. Jamais ma main droite ne trouvera une étude d'anatomie pareille à celle que lui offre ma main gauche, et l'égoïste en profite.

En effet Géricault était arrivé à un tel état de maigreur, qu'à travers la peau, on voyait les muscles de sa main, comme on les voit sur ces plâtres d'écorchés que l'on donne pour modèles aux élèves.

Eh bien, mon cher ami, lui demanda Bro, comment avez-vous supporté l'opération d'hier ?

Très bien... C'était très curieux. Imaginez-vous que ces bourreaux-là m'ont charcuté pendant dix minutes.

Vous avez dû souffrir horriblement ?

Pas trop... Je pensais à autre chose.

À quoi pensiez-vous ?

À un tableau.

Comment cela ?

C'est bien simple. J'avais fait tourner la tête de mon lit en face de la glace, de sorte que, pendant qu'ils travaillaient sur mes reins, je les regardais faire en me soulevant sur mes coudes [Ah, si j'en reviens, je vous réponds que je ferai un fier pendant à l'étude d'anatomie d'André Vésale ! Seulement, mon étude d'anatomie, à moi, sera faite sur un homme vivant] [... ]

Bro demanda au malade la permission de me montrer sa Méduse.

« Faites, dit Géricault, vous êtes chez vous. »

Et il continua de dessiner sa main.

Je restai longtemps en face de ce merveilleux tableau, quoique je fusse bien loin, à cette époque, ignorant en art comme je l'étais, de l'estimer à sa juste valeur.

En sortant, je marchais sur l'envers d'une toile ; je ramassai cette toile, et, la regardant à l'endroit, j'aperçus une merveilleuse tête d'ange déchu. Je la donnai à Bro. « Voyez donc, lui dis-je, voyez ce que je trouve sous mon pied ? »

Bro revint au malade.

Ah çà ! Êtes-vous fou, mon cher, de laisser traîner de pareilles choses ?

Savez-vous ce que c'est que cette tête ? demanda Géricault en riant.

Non.

Eh bien, mon cher, c'est le fils de votre portier. Il est entré, l'autre jour, dans mon atelier, et j'ai été étonné du parti qu'on pouvait tirer de sa tête. Je l'ai fait asseoir, et en dix minutes, j'ai fait cette étude d'après lui... La voulez-vous ? Prenez-la.

Mais, si c'est une étude, vous l'avez faite dans un but ?

Oui, dans le but d'étudier.

Elle peut vous être utile un jour ?

Un jour, mon cher Bro, c'est bien loin, et d'ici là, il passera beaucoup d'eau sous le pont, et beaucoup de morts par la porte du cimetière Montmartre.

Eh bien ! eh bien ! dit Bro.

Prenez-là toujours, mon ami, dit Géricault ; si j'en ai besoin, je la retrouverai chez vous.

Puis il nous fit de la tête un signe d'adieu, et nous sortîmes.

Bro emporta sa tête d'ange.

Huit jours après, Géricault était mort et de Dreux-d'Orcy, l'ami intime de Géricault, et son exécuteur testamentaire, vendait avec grand peine, six mille francs à l'administration des beaux-arts, La Méduse, cette toile aujourd'hui l'une des plus précieuses du Musée.

Encore le gouvernement ne l'achetait-il que pour en faire couper cinq ou six têtes, dont il comptait faire des têtes d'étude pour les élèves.

De Dreux-d'Orcy obtint heureusement que ce sacrilège restât à l'état de projet. 

..................................

*Le Radeau de la Méduse, 1817 - 1819

Lors de cet épisode, Alexandre Dumas avait 22 ans.

 

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FLORILÈGE - LA PENSÉE DES AUTRES (titres des textes)

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16 juillet 2011 6 16 /07 /juillet /2011 16:00

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Un florilège de textes sélectionnés par mamiehiou

.                                                                                                          

 

-8-

 

La vie heureuse

 

Sénèque le Jeune (14 avant J.C. 65 après J.C.)

 

Philosophe de l'école stoïcienne, dramaturge, homme d'état romain

                                               

Joignez à cela, que le plaisir s'unit même à la vie la plus honteuse ; au lieu que la vertu n'admet pas une mauvaise vie. De plus, certains hommes sont malheureux, non pas en l'absence du plaisir, mais à cause du plaisir même : et cela n'arriverait pas, si à la vertu s'était incorporé le plaisir, dont souvent elle manque, dont jamais elle n'a besoin. Pourquoi réunissez-vous des objets différents, et même opposés ? La vertu est quelque chose d'élevé, de sublime, de souverain, d'invincible, d'infatigable ; le plaisir, quelque chose de rampant, de servile, d'énervé, de chancelant, dont le poste et la demeure sont les lieux de prostitution et les tavernes. La vertu, vous la trouverez dans le temple, dans le forum, dans le sénat, debout sur les remparts, couverte de poussière ; elle a le teint hâlé, les mains calleuses ; le plaisir, vous le verrez fuir de cachette en cachette, et chercher les ténèbres, aux environs des bains, des étuves, et des lieux qui redoutent. la présence de l'édile ; le plaisir est mou, lâche, humecté de vin et de parfums, pâle ou fardé, et souillé des drogues de la toilette. Le souverain bien est immortel ; il ne sait pas cesser d'être ; il n'éprouve ni la satiété, ni le repentir ; car jamais un esprit droit ne se détourne : un tel esprit ne se prend pas en haine, et il n'a rien changé, parce qu'il a toujours suivi ce qu'il y a de meilleur. Au contraire le plaisir, alors qu'il charme le plus, s'éteint ; il ne dispose pas d'un grand espace : aussi le remplit-il bientôt ; il cause l'ennui, et après le premier essor, il est languissant. D'ailleurs ce n'est jamais une chose certaine, que celle dont la nature consiste dans le mouvement. D'après cela, il ne peut seulement pas y avoir de réalité pour ce qui vient et passe au plus vite, devant périr dans l'usage même de son être ; car ce je ne sais quoi ne parvient en un point, que pour y cesser ; et tandis qu'il commence, il tire à sa fin.

Traduction de Héron de Villefosse

 

.........................................
 

Ce que Sénèque dit du souverain bien :

C'est l'âme qui dédaigne les coups du sort et se réjouit dans la vertu, la force d'une âme invincible, expérimentée, paisible dans l'action, alliée à beaucoup d'humanité et soucieuse de ses semblables.

 

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16 juillet 2011 6 16 /07 /juillet /2011 15:35

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-7-

 

Le Corbeau – The Raven

 

Edgar Allan Poe (1809-1849)

Poète, romancier, nouvelliste américain


Le poème est suivi de la traduction de Charles Baudelaire


Once upon a midnight dreary, while I pondered weak and weary,
Over many a quaint and curious volume of forgotten lore,
While I nodded, nearly napping, suddenly there came a tapping,
As of some one gently rapping, rapping at my chamber door.
"Tis some visitor," I muttered, "tapping at my chamber door
Only this, and nothing more."

Ah, distinctly I remember it was in the bleak December,
And each separate dying ember wrought its ghost upon the floor.
Eagerly I wished the morrow; vainly I had sought to borrow
From my books surcease of sorrow sorrow for the lost Lenore
For the rare and radiant maiden whom the angels named Lenore
Nameless here for evermore.

And the silken sad uncertain rustling of each purple curtain
Thrilled me filled me with fantastic terrors never felt before ;
So that now, to still the beating of my heart, I stood repeating
"Tis some visitor entreating entrance at my chamber door
Some late visitor entreating entrance at my chamber door ;
This it is, and nothing more,"

Presently my heart grew stronger; hesitating then no longer,
"Sir," said I, "or Madam, truly your forgiveness I implore ;
But the fact is I was napping, and so gently you came rapping,
And so faintly you came tapping, tapping at my chamber door,
That I scarce was sure I heard you" -- here I opened wide the door ;
Darkness there, and nothing more.

Deep into that darkness peering, long I stood there wondering, fearing,
Doubting, dreaming dreams no mortal ever dared to dream to dream before ;
But the silence was unbroken, and the darkness gave no token,
And the only word there spoken was the whispered word, "Lenore!"
This I whispered, and an echo murmured back the word "Lenore!"
Merely this and nothing more.

Back into the chamber turning, all my soul within me burning,
Soon again I heard a tapping somewhat louder than before.
"Surely," said I, "surely that is something at my window lattice ;
Let me see then, what thereat is, and this mystery explore
Let my heart be still a moment and this mystery explore ;
'Tis the wind and nothing more!"

Open here I flung the shutter, when, with many a flirt and flutter,
In there stepped a stately raven of the saintly days of yore.
Not the least obeisance made he ; not an instant stopped or stayed he ;
But, with mien of lord or lady, perched above my chamber door
Perched upon a bust of Pallas just above my chamber door
Perched, and sat, and nothing more.

Then this ebony bird beguiling my sad fancy into smiling,
By the grave and stern decorum of the countenance it wore,
"Though thy crest be shorn and shaven, thou," I said, "art sure no craven.
Ghastly grim and ancient raven wandering from the Nightly shore
Tell me what thy lordly name is on the Night's Plutonian shore !"
Quoth the raven, "Nevermore."

Much I marvelled this ungainly fowl to hear discourse so plainly,
Though its answer little meaning little relevancy bore ;
For we cannot help agreeing that no living human being
Ever yet was blessed with seeing bird above his chamber door
Bird or beast above the sculptured bust above his chamber door,
With such name as "Nevermore."

But the raven, sitting lonely on the placid bust, spoke only
That one word, as if his soul in that one word he did outpour.
Nothing further then he uttered not a feather then he fluttered
Till I scarcely more than muttered "Other friends have flown before
On the morrow will he leave me, as my hopes have flown before."
Then the bird said, "Nevermore."

Startled at the stillness broken by reply so aptly spoken,
"Doubtless," said I, "what it utters is its only stock and store,
Caught from some unhappy master whom unmerciful Disaster
Followed fast and followed faster till his songs one burden bore
Till the dirges of his Hope that melancholy burden bore
Of 'Never-nevermore."

But the Raven still beguiling all my sad soul into smiling,
Straight I wheeled a cushioned seat in front of bird and bust and door;
Then, upon the velvet sinking, I betook myself to linking
Fancy unto fancy, thinking what this ominous bird of yore
What this grim, ungainly, gaunt, and ominous bird of yore
Meant in croaking "Nevermore."

This I sat engaged in guessing, but no syllable expressing
To the fowl whose fiery eyes now burned into my bosom's core;
This and more I sat divining, with my head at ease reclining
On the cushion's velvet violet lining that the lamp-light gloated o'er,
But whose velvet violet lining with the lamp-light gloating o'er,
She shall press, ah, nevermore!

Then, methought the air grew denser, perfumed from an unseen censer
Swung by angels whose faint foot-falls tinkled on the tufted floor.
"Wretch," I cried, "thy God hath lent thee - by these angels he has sent thee
Respite - respite and nepenthe from the memories of Lenore!
Quaff, oh quaff this kind nepenthe, and forget this lost Lenore !"
Quoth the raven, "Nevermore."

"Prophet !" said I, "thing of evil! prophet still, if bird or devil !
Whether Tempter sent, or whether tempest tossed thee here ashore,
Desolate yet all undaunted, on this desert land enchanted
On this home by Horror haunted tell me truly, I implore
Is there is there balm in Gilead ? tell me tell me, I implore !"
Quoth the raven, "Nevermore."

"Prophet!' said I, "thing of evil ! prophet still, if bird or devil !
By that Heaven that bends above us by that God we both adore
Tell this soul with sorrow laden if, within the distant Aidenn,
It shall clasp a sainted maiden whom the angels named Lenore
Clasp a rare and radiant maiden, whom the angels named Lenore ?"
Quoth the raven, "Nevermore."

"Be that word our sign of parting, bird or fiend!" I shrieked upstarting
"Get thee back into the tempest and the Night's Plutonian shore !
Leave no black plume as a token of that lie thy soul hath spoken!
Leave my loneliness unbroken! quit the bust above my door !
Take thy beak from out my heart, and take thy form from off my door !"
Quoth the raven, "Nevermore."

And the raven, never flitting, still is sitting, still is sitting
On the pallid bust of Pallas just above my chamber door ;
And his eyes have all the seeming of a demon's that is dreaming,
And the lamp-light o'er him streaming throws his shadow on the floor ;
And my soul from out that shadow that lies floating on the floor
Shall be lifted nevermore.

Le Corbeau

Traduction de Charles Baudelaire

Une fois, sur le minuit lugubre, pendant que je méditais, faible et fatigué, sur maint précieux et curieux volume d’une doctrine oubliée, pendant que je donnais de la tête, presque assoupi, soudain il se fit un tapotement, comme de quelqu’un frappant doucement, frappant à la porte de ma chambre. « C’est quelque visiteur, – murmurai-je, – qui frappe à la porte de ma chambre ; ce n’est que cela et rien de plus. »

Ah ! distinctement je me souviens que c’était dans le glacial décembre, et chaque tison brodait à son tour le plancher du reflet de son agonie. Ardemment je désirais le matin ; en vain m’étais-je efforcé de tirer de mes livres un sursis à ma tristesse, ma tristesse pour ma Lénore perdue, pour la précieuse et rayonnante fille que les anges nomment Lénore, – et qu’ici on ne nommera jamais plus.

Et le soyeux, triste et vague bruissement des rideaux pourprés me pénétrait, me remplissait de terreurs fantastiques, inconnues pour moi jusqu’à ce jour ; si bien qu’enfin pour apaiser le battement de mon cœur, je me dressai, répétant : « C’est quelque visiteur attardé sollicitant l’entrée à la porte de ma chambre ; – c’est cela même, et rien de plus. »

Mon âme en ce moment se sentit plus forte. N’hésitant donc pas plus longtemps : « Monsieur, dis-je, ou madame, en vérité, j’implore votre pardon ; mais le fait est que je sommeillais et vous êtes venu frapper si doucement, si faiblement vous êtes venu frapper à la porte de ma chambre, qu’à peine étais-je certain de vous avoir entendu. » Et alors j’ouvris la porte toute grande ; – les ténèbres, et rien de plus.

Scrutant profondément ces ténèbres, je me tins longtemps plein d’étonnement, de crainte, de doute, rêvant des rêves qu’aucun mortel n’a jamais osé rêver ; mais le silence ne fut pas troublé, et l’immobilité ne donna aucun signe, et le seul mot proféré fut un nom chuchoté : « Lénore ! » – C’était moi qui le chuchotais, et un écho à son tour murmura ce mot : « Lénore ! » Purement cela, et rien de plus.

Rentrant dans ma chambre, et sentant en moi toute mon âme incendiée, j’entendis bientôt un coup un peu plus fort que le premier. « Sûrement, – dis-je, – sûrement, il y a quelque chose aux jalousies de ma fenêtre ; voyons donc ce que c’est, et explorons ce mystère. Laissons mon cœur se calmer un instant, et explorons ce mystère ; – c’est le vent, et rien de plus. »

Je poussai alors le volet, et, avec un tumultueux battement d’ailes, entra un majestueux corbeau digne des anciens jours. Il ne fit pas la moindre révérence, il ne s’arrêta pas, il n’hésita pas une minute ; mais avec la mine d’un lord ou d’une lady, il se percha au-dessus de la porte de ma chambre ; il se percha sur un buste de Pallas juste au-dessus de la porte de ma chambre ; – il se percha, s’installa, et rien de plus.

Alors, cet oiseau d’ébène, par la gravité de son maintien et la sévérité de sa physionomie, induisant ma triste imagination à sourire : « Bien que ta tête, – lui dis-je, – soit sans huppe et sans cimier, tu n’es certes pas un poltron, lugubre et ancien corbeau, voyageur parti des rivages de la nuit. Dis-moi quel est ton nom seigneurial aux rivages de la nuit plutonienne ! » Le corbeau dit : « Jamais plus ! »

Je fus émerveillé que ce disgracieux volatile entendît si facilement la parole, bien que sa réponse n’eût pas un bien grand sens et ne me fût pas d’un grand secours ; car nous devons convenir que jamais il ne fut donné à un homme vivant de voir un oiseau au-dessus de la porte de sa chambre, un oiseau ou une bête sur un buste sculpté au-dessus de la porte de sa chambre, se nommant d’un nom tel que – Jamais plus !

Mais le corbeau, perché solitairement sur le buste placide, ne proféra que ce mot unique, comme si dans ce mot unique il répandait toute son âme. Il ne prononça rien de plus ; il ne remua pas une plume, – jusqu’à ce que je me prisse à murmurer faiblement : « D’autres amis se sont déjà envolés loin de moi ; vers le matin, lui aussi, il me quittera comme mes anciennes espérances déjà envolées. » L’oiseau dit alors : « Jamais plus ! »

Tressaillant au bruit de cette réponse jetée avec tant d’à-propos : Sans doute, – dis-je, – ce qu’il prononce est tout son bagage de savoir, qu’il a pris chez quelque maître infortuné que le Malheur impitoyable a poursuivi ardemment, sans répit, jusqu’à ce que ses chansons n’eussent plus qu’un seul refrain, jusqu’à ce que le De profundis de son Espérance eût pris ce mélancolique refrain : « Jamais – jamais plus ! »

Mais le corbeau induisant encore toute ma triste âme à sourire, je roulai tout de suite un siège à coussins en face de l’oiseau et du buste et de la porte ; alors, m’enfonçant dans le velours, je m’appliquai à enchaîner les idées aux idées, cherchant ce que cet augural oiseau des anciens jours, ce que ce triste, disgracieux, sinistre, maigre et augural oiseau des anciens jours voulait faire entendre en croassant son – Jamais plus !

Je me tenais ainsi, rêvant, conjecturant, mais n’adressant plus une syllabe à l’oiseau, dont les yeux ardents me brûlaient maintenant jusqu’au fond du cœur : je cherchai à deviner cela, et plus encore, ma tête reposant à l’aise sur le velours du coussin que caressait la lumière de la lampe, ce velours violet caressé par la lumière de la lampe que sa tête, à Elle, ne pressera plus, – ah ! jamais plus !

Alors, il me sembla que l’air s’épaississait, parfumé par un encensoir invisible que balançaient les séraphins dont les pas frôlaient le tapis de ma chambre. « Infortuné ! – m’écriai-je, – ton Dieu t’a donné par ses anges, il t’a envoyé du répit, du répit et du népenthès dans tes ressouvenirs de Lénore ! Bois, oh ! bois ce bon népenthès, et oublie cette Lénore perdue ! » Le corbeau dit : «Jamais plus ! »

« Prophète ! – dis-je, – être de malheur ! oiseau ou démon ! mais toujours prophète ! que tu sois un envoyé du Tentateur, ou que la tempête t’ait simplement échoué, naufragé, mais encore intrépide, sur cette terre déserte, ensorcelée, dans ce logis par l’Horreur hanté, – dis-moi sincèrement, je t’en supplie, existe-t-il, existe-t-il ici un baume de Judée ? Dis, dis, je t’en supplie ! » Le corbeau dit : « Jamais plus ! »

« Prophète ! – dis-je, – être de malheur ! oiseau ou démon ! toujours prophète ! par ce ciel tendu sur nos têtes, par ce Dieu que tous deux nous adorons, dis à cette âme chargée de douleur si, dans le Paradis lointain, elle pourra embrasser une fille sainte que les anges nomment Lénore, embrasser une précieuse et rayonnante fille que les anges nomment Lénore. » Le corbeau dit : « Jamais plus ! »

« Que cette parole soit le signal de notre séparation, oiseau ou démon ! – hurlai-je en me redressant. – Rentre dans la tempête, retourne au rivage de la nuit plutonienne ; ne laisse pas ici une seule plume noire comme souvenir du mensonge que ton âme a proféré ; laisse ma solitude inviolée ; quitte ce buste au-dessus de ma porte ; arrache ton bec de mon cœur et précipite ton spectre loin de ma porte ! » Le corbeau dit : « Jamais plus ! »

Et le corbeau, immuable, est toujours installé sur le buste pâle de Pallas, juste au-dessus de la porte de ma chambre ; et ses yeux ont toute la semblance des yeux d’un démon qui rêve ; et la lumière de la lampe, en ruisselant sur lui, projette son ombre sur le plancher ; et mon âme, hors du cercle de cette ombre qui gît flottante sur le plancher, ne pourra plus s’élever, – jamais plus !

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16 juillet 2011 6 16 /07 /juillet /2011 12:04

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-6-

 

Voyage autour de ma chambre

 

Xavier de Maistre (1763 -1852)

 

 

CHAPITRE XX

[Extrait]

Heureux celui qui trouve un ami dont le cœur et l'esprit lui conviennent ; un ami qui s'unisse à lui par une conformité de goûts, de sentiments et de connaissances ; un ami qui ne soit pas tourmenté par l'ambition ou l'intérêt ; — qui préfère l'ombre d'un arbre à la pompe d'une cour ! — Heureux celui qui possède un ami !


 

CHAPITRE XXI.

J'en avais un : la mort me l'a ôté ; elle l'a saisi au commencement de sa carrière, au moment où son amitié était devenue un besoin pressant pour mon cœur. — Nous nous soutenions mutuellement dans les travaux pénibles de la guerre ; nous n'avions qu'une pipe à nous deux ; nous buvions dans la même coupe ; nous couchions sous la même toile, et, dans les circonstances malheureuses où nous sommes, l'endroit où nous vivions ensemble était pour nous une nouvelle patrie : je l'ai vu en butte à tous les périls de la guerre, et d'une guerre désastreuse. — La mort semblait nous épargner l'un pour l'autre : elle épuisa mille fois ses traits autour de lui sans l'atteindre ; mais c'était pour me rendre sa perte plus sensible. Le tumulte des armes, l'enthousiasme qui s'empare de l'âme à l'aspect du danger, auraient peut-être empêché ses cris d'aller jusqu'à mon cœur. Sa mort eût été utile à son pays et funeste aux ennemis : — je l'aurais moins regretté. — Mais le perdre au milieu des délices d'un quartier d'hiver ! le voir expirer dans mes bras au moment où il paraissait regorger de santé ; au moment où notre liaison se resserrait encore dans le repos et la tranquillité I — Ah ! je ne m'en consolerai jamais ! Cependant sa mémoire ne vit plus que dans mon cœur ; elle n'existe plus parmi ceux qui l'environnaient et qui l'ont remplacé ; cette idée me rend plus pénible le sentiment de sa perte. La nature, indifférente de même au sort des individus, remet sa robe brillante du printemps et se pare de toute sa beauté autour du cimetière où il repose. Les arbres se couvrant de feuilles et entrelacent leurs branches ; les oiseaux chantent sous le feuillage ; les mouches bourdonnent parmi les fleurs ; tout respire la joie et la vie dans le séjour de la mort : — et le soir, tandis que la lune brille dans le ciel, et que je médite près de ce triste lieu, j'entends le grillon poursuivre gaiement son chant infatigable, caché sous l'herbe qui couvre la tombe silencieuse de mon ami. La destruction insensible des êtres et tous les malheurs de l'humanité sont comptés pour rien dans le grand tout. — La mort d'un homme sensible qui expire au milieu de ses amis désolés, et celle d'un papillon que l'air froid du matin fait périr dans le calice d'une fleur, sont deux époques semblables dans le cours de la nature. L'homme n'est rien qu'un fantôme, une ombre, une vapeur qui se dissipe dans les airs,..

Mais l'aube matinale commence à blanchir le ciel ; les noires idées qui m'agitaient s'évanouissent avec la nuit, et l'espérance renaît dans mon cœur.

Non, celui qui inonde ainsi l'orient de lumière ne l'a point fait briller à mes regards pour me plonger bientôt dans la nuit du néant. Celui qui étendit cet horizon incommensurable, celui qui éleva ces masses énormes, dont le soleil dore les sommets glacés, est aussi celui qui a ordonné à mon cœur de battre et à mon esprit de penser.

Non, mon ami n'est point entré dans le néant ; quelle que soit la barrière qui nous sépare, je le reverrai. Ce n'est point sur un syllogisme que je fonde mon espérance. — Le vol d'un insecte qui traverse les airs suffit pour me persuader ; et souvent l'aspect de la campagne, le parfum des airs, et je ne sais quel charme répandu autour de moi, élèvent tellement mes pensées, qu'une preuve invincible de l'immortalité entre avec violence dans mon âme et l'occupe tout entière.

 

.....................................
 

Vers 1790, Xavier de Maistre alors officier de l'armée eut un duel qui lui valut quarante-deux jours d'arrêts dans une petite ville, près de Turin, que l'on nommait Alexandrie de la Paille – Alexandrie en l'honneur du pape Alexandre III alors régnant, et de la Paille, car, lorsqu'elle fut bâtie, ses toits n'étaient que de chaume. Xavier ne se destinait pas à l'écriture mais il tira profit de ce séjour en prison pour écrire son "Voyage autour de ma chambre", texte qui n'aurait jamais été publié si son frère, le Comte Joseph de Maistre n'avait pris la liberté de le faire.

 

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-5-

 

Correspondance

 

Marie-Henry Beyle dit Stendhal (1783 - 1842)

 

De l'esprit et de l'amour

 

J'avais un dîner délicieux hier où se trouvaient neuf hommes d'esprit et moi. Quel malheur ! Je n'ai point été brillant du tout. J'ai peu parlé et ce peu était lourd. Cette catastrophe a agité ma grande âme. Peut-être qu'il faudra que je renonce à l'amour ; car, ne pas briller, comment s'accoutumer à ce malheur ? Il est vrai qu'il me reste la beauté et l'opulence. Mais je ne sais, j'aimais mieux les succès de mon esprit ; ils étaient plus à moi.

 

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  -4-

 

Pensées - Les deux infinis

 

Blaise Pascal (1623 - 1662)

 

Mathématicien, physicien, inventeur,

philosophe, moraliste

et théologien

 

Que l'homme contemple donc la nature entière dans sa haute et pleine majesté, qu'il éloigne sa vue des objets bas qui l'environnent. Qu'il regarde cette éclatante lumière, mise comme une lampe éternelle pour éclairer l'univers, que la terre lui paraisse comme un point au prix du vaste tour que cet astre décrit et qu'il s'étonne de ce que ce vaste tour lui-même n'est qu'une pointe très délicate à l'égard de celui que les astres qui roulent dans le firmament embrassent.

Mais si notre vue s'arrête là, que l'imagination passe outre ; elle se lassera plutôt de concevoir, que la nature de fournir. Tout ce monde visible n'est qu'un trait imperceptible dans l'ample sein de la nature. Nulle idée n'en approche. Nous avons beau enfler nos conceptions au-delà des espaces imaginables, nous n'enfantons que des atomes, au prix de la réalité des choses. C'est une sphère dont le centre est partout, la circonférence nulle part. Enfin, c'est le plus grand caractère sensible de la toute puissance de Dieu, que notre imagination se perde dans cette pensée.
Que l'homme, étant revenu à soi, considère ce qu'il est au prix de ce qui est ; qu'il se regarde comme égaré dans ce canton détourné de la nature; et que de ce petit cachot où il se trouve logé, j'entends l'univers, il apprenne à estimer la terre, les royaumes, les villes et soi-même son juste prix. Qu'est-ce qu'un homme dans l'infini ?
Mais pour lui présenter un autre prodige aussi étonnant, qu'il recherche dans ce qu'il connaît les choses les plus délicates. Qu'un ciron lui offre dans la petitesse de son corps des parties incomparablement plus petites, des jambes avec des jointures, des veines dans ces jambes, du sang dans ces veines, des humeurs dans ce sang, des gouttes dans ces humeurs, des vapeurs dans ces gouttes; que, divisant encore ces dernières choses, il épuise ses forces en ces conceptions, et que le dernier objet où il peut arriver soit maintenant celui de notre discours ; il pensera peut-être que c'est là l'extrême petitesse de la nature. Je veux lui faire voir là dedans un abîme nouveau. Je lui veux peindre non seulement l'univers visible, mais l'immensité qu'on peut concevoir de la nature, dans l'enceinte de ce raccourci d'atome. Qu'il y voie une infinité d'univers, dont chacun a son firmament, ses planètes, sa terre, en la même proportion que le monde visible ; dans cette terre, des animaux, et enfin des cirons, dans lesquels il retrouvera ce que les premiers ont donné ; et trouvant encore dans les autres la même chose sans fin et sans repos, qu'il se perde dans ses merveilles, aussi étonnantes dans leur petitesse que les autres par leur étendue; car qui n'admirera que notre corps, qui tantôt n'était pas perceptible dans l'univers, imperceptible lui-même dans le sein du tout, soit à présent un colosse, un monde, ou plutôt un tout, à l'égard du néant où l'on ne peut arriver ?
Qui se considérera de la sorte s'effrayera de soi-même, et, se considérant soutenu dans la masse que la nature lui a donnée, entre ces deux abîmes de l'infini et du néant, il tremblera dans la vue de ces merveilles ; et je crois que sa curiosité, se changeant en admiration, il sera plus disposé à les contempler en silence qu'à les rechercher avec présomption.

Car enfin qu'est-ce que l'homme dans la nature ? Un néant à l'égard de l'infini, un tout à l'égard du néant, un milieu entre rien et tout. Infiniment éloigné de comprendre les extrêmes, la fin des choses et leur principe sont pour lui invinciblement cachés dans un secret impénétrable, également incapable de voir le néant d'où il est tiré, et l'infini où il est englouti.
Que fera-t-il donc, sinon d'apercevoir quelque apparence du milieu des choses, dans un désespoir éternel de connaître ni leur principe ni leur fin ? Toutes choses sont sorties du néant et portées jusqu'à l'infini. Qui suivra ces étonnantes démarches ? L'auteur de ces merveilles les comprend. Tout autre ne le peut faire.
Manque d'avoir contemplé ces infinis, les hommes se sont portés témérairement à la recherche de la nature, comme s'ils avaient quelque proportion avec elle. C'est une chose étrange qu'ils ont voulu comprendre les principes des choses, et de là arriver jusqu'à connaître tout, par une présomption aussi infinie que leur objet. Car il est sans doute qu'on ne peut former ce dessein sans une présomption ou sans une capacité infinie, comme la nature.
Quand on est instruit, on comprend que la nature ayant gravé son image et celle de son auteur dans toutes choses, elles tiennent presque toutes de sa double infinité.

 

J'ai pris la liberté d'écrire en caractères gras le paragraphe qui est l'un des plus connus.

Note de Mamiehiou

 

L'homme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature ; mais c'est un roseau pensant. Il ne faut pas que l'univers entier s'arme pour l'écraser : une vapeur, une goutte d'eau suffit pour le tuer. Mais, quand l'univers l'écraserait, l'homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu'il sait qu'il meurt, et l'avantage que l'univers a sur lui, l'univers n'en sait rien.
Toute notre dignité consiste donc en la pensée…
Travaillons donc à bien penser…

 

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16 juillet 2011 6 16 /07 /juillet /2011 06:05

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 Un florilège de textes sélectionnés par mamiehiou

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 -3-

 

 

Pensées et fragments

 

Arthur Schopenhauer (1788–1860)

 

Philosophe allemand

 

Douleurs du monde

La consolation la plus efficace, dans tout malheur, c'est de tourner les yeux vers ceux qui sont encore plus malheureux que nous : ce remède est à la portée de chacun. Mais qu'en résulte-t-il pour l'ensemble ?

Semblables aux moutons qui jouent dans la prairie, pendant que, du regard, le boucher fait son choix au milieu du troupeau, nous ne savons pas, dans nos jours heureux, quel désastre le destin nous prépare précisément à cette heure, - maladie, persécution, ruine, mutilation, cécité, folie, etc.*

Tout ce que nous recherchons à saisir nous résiste ; tout a sa volonté hostile qu'il faut vaincre. Dans la vie des peuples, l'histoire ne nous montre que guerres et séditions : les années de paix ne nous semblent que de courtes pauses, des entr'actes, une fois par hasard. Et de même la vie de l'homme est un combat perpétuel, non pas seulement contre des maux abstraits, la misère ou l'ennui ; mais contre les autres hommes. Partout on trouve un adversaire ; la vie est une guerre sans trêve, et l'on meurt les armes à la main.

 

Traduction de Jean Bourdeau (1848 - 1928)

...........................................

*"Nous sommes des victimes condamnées toutes à la mort ; nous ressemblons aux moutons qui bêlent, qui jouent, qui bondissent en attendant qu'on les égorge. Leur grand avantage sur nous est qu'ils ne se doutent pas qu'ils seront égorgés, et que nous le savons." Voltaire (note du traducteur)

 

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  • J'aime trop les mots pour les garder par-devers moi - au fond de mon coeur et de mon esprit. Ils débordent de mes pensées en contes drolatiques, avec des quiz et des digressions sur la langue.
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